Capable de suivre un individu dans une foule, ce laser détecte les entorses aux règles sanitaires. Exempte de système de reconnaissance faciale, la start-up Outsight affiche son respect des droits privés. De fait, si toute identification reste impossible, la question de la nécessité d’un tel dispositif se pose tout de même...
Un laser capable de suivre une personne suspecte dans la foule pour lutter contre l’épidémie du Covid-19… Selon la start-up Outsight à l’origine de ce dispositif, il s’agirait de surveiller le respect des gestes barrières dans de larges espaces. Et ce, en vérifiant que tout le monde porte bien son masque, respecte la distanciation physique. Ou que nul n’a de la fièvre. Parmi les revendications de la start-up française qui a été primée au CES 2020 de Las Vegas, figure le respect de la vie privée. En effet, plutôt que de se servir de la reconnaissance faciale, celle-ci exploite une caméra sémantique 3D pourvue d’un laser autonome. Ce dernier repère et suit les individus suspects sans pour autant relever leur identité. Mais est-ce réellement justifié ?
Vérifier que tout le monde porte son masque
À l’origine, l’entreprise a mis au point cette technologie pour l’industrie automobile et plus particulièrement pour les véhicules autonomes. Or à l’instar de nombreuses entreprises reconverties, Outsight a vu pour son laser autonome un nouveau rôle à jouer. En effet, il se trouve que ce dernier permet d’identifier et de suivre certaines caractéristiques au milieu d’une foule. Comme un objet ou un détail sur une personne, tel que le port ou non d’un masque de protection.
Surveiller les rapprochements physiques
D’autre part, le système suit les dynamiques de flux de personnes, leurs déplacements et surtout leurs points de rencontre. En cas de congestion, le système peut alors détecter des comportements non respectueux des règles de distanciation. Et alerter les responsables de la sécurité en vue d’une interpellation. Cette technologie a déjà convaincu l’aéroport de Roissy qui s’en sert au sein de son terminal 2E. Objectif : détecter les files d’attente ou fluidifier les déplacements des passagers.
La prise de température, un dispositif polémique
Autre point important, ces caméras laser peuvent embarquer des détecteurs thermiques pour la prise de température des personnes. Or il faut rappeler que la fièvre comme indicateur du Covid-19 a été largement décrédibilisée. Et ce, même de la part de l’Association nationale de vidéoprotection (AN2V). Ce regroupement d’acteurs de la vidéosurveillance s’est récemment positionné contre. Se ralliant à l’avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP), il a émis un avis défavorable à l’usage des détecteurs thermiques. Estimant qu’il « n’apparaît pas comme une mesure fiable pour repérer les personnes infectées par le virus SARS-CoV-2 et en éviter sa diffusion. »
Suivi des individus et respect de leurs droits
Du côté du respect de la vie privée, la start-up se revendique du bon bord. De fait, seul un laser se charge de suivre les personnes et non pas la caméra elle-même. Privé de reconnaissance faciale, le système ne peut reconnaître et identifier les visages. Ce qui évite notamment la constitution d’une banque d’images. Pour suivre les personnes, le système fonctionne donc comme un radar, et plus précisément un lidar. Émettant de la lumière, le laser analyse les formes par ricochet des ondes envoyées et reçues. Reste qu’il faut se demander si cet argument justifie réellement la poursuite d’une personne à son insu. Voire son interpellation ?
Ségolène Kahn
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