Le Sénat vient de voter une proposition de loi pour fixer l’usage de la reconnaissance biométrique et notamment faciale dans l’espace public. Durant trois ans, des enquêteurs judiciaires et les services de renseignement vont expérimenter ces technologies dans un cadre délimité.
Face au débat sur la démocratisation des technologies de reconnaissance biométrique et le droit à la vie privée, le Sénat vient de trancher. Lundi 12 juin, les sénateurs ont adopté par 226 voix, contre 117, une proposition de loi relative à la reconnaissance biométrique dans l’espace public. Il s’agit d’encadrer les principes relatifs à l’usage de ces technologies pour « écarter le risque d’une société de surveillance ». Avec 30 propositions citées, les parlementaires définissent les lignes rouges à ne pas dépasser pour l’emploi de ces technologies controversées. Cette proposition de loi provient des sénateurs par Marc-Philippe Daubresse (Les Républicains, LR) et Arnaud de Belenet (Alliance centriste).
Éviter les dérives
En matière de reconnaissance biométrique, ce sont surtout les technologies de reconnaissance faciales qui font polémique. Ces données, considérées comme sensibles par le règlement général sur la protection des données (RGPD), les données biométriques font l’objet d’un encadrement particulier. Selon la Commission nationale de l’informatique des libertés (CNIL), il est obligatoire d’obtenir le consentement des personnes concernées, sauf en cas d’intérêt public. Par principe, la reconnaissance faciale s’avère donc interdite sans le consentement de l’intéressé. D’où l’importance d’un encadrement légal pour éviter les dérives.
Des expérimentations durant trois ans
Le texte voté par le Sénat fixe le cadre légal d’une période d’essai : les enquêteurs judiciaires et les services de renseignement auront trois ans pour conduire leurs expérimentations. À l’issue de ces recherches, un rapport sera réalisé pour pérenniser ou non ces mesures.
Lutte contre le terrorisme ou enlèvement d’enfant
Concrètement, la reconnaissance biométrique et notamment faciale se distingue en deux utilisations. La première, a posteriori, se réalise sur des images récoltées puis traitées. Quant à la reconnaissance biométrique en temps réel, elle s’effectue sur le vif, et constitue donc un enjeu sensible. Cette dernière ne pourra servir aux services de renseignement qu’en cas de lutte contre le terrorisme. Les enquêteurs judiciaires pourront l’utiliser en cas d’affaires particulièrement graves, comme l’enlèvement d’un enfant ou pour identifier un suspect dans un fait de criminalité critique. Quoiqu’il en soit, les autorisations nécessaires à cet usage ne pourront émaner que du premier ministre, du procureur ou d’un juge d’instruction. Et seulement pour 48 heures…
Une autorisation d’un mois pour la biométrie a posteriori
En ce qui concerne la biométrie faciale a posteriori, elle sera circonscrite aux enquêtes judiciaires pour terrorisme et faits graves. Et devra se baser sur les images et informations du dossier d’enquête, sous réserve d’une autorisation du procureur ou du juge d’instruction. Quant aux services de renseignement, il pourront obtenir une autorisation d’un mois dans le cas d’un suspect en fuite ou d’un risque d’attentat. Ils pourront ainsi exploiter la reconnaissance faciale à partir d’enregistrements de vidéosurveillance.
Ségolène Kahn
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