Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Risques industriels et environnementaux

Mesurer les expositions environnementales : un enjeu de santé publique en Île-de-France

L’Ors Île-de-France, l’Institut Paris Région et l’Ineris viennent de publier une étude menée pendant 5 ans pour identifier les secteurs d’Île-de-France les plus pollués et les populations exposées. Basée sur une méthodologie innovante, qui découpe le territoire en 48 825 mailles, cette étude fera bientôt l’objet d’une cartographie interactive. Objectif : prendre les bonnes décisions politiques.

Dans le cadre du troisième Plan régional de santé environnement (PRSE3), l’Observatoire de la santé d’Île-de-France (Ors Île-de-France), l’Institut Paris Région et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) se sont associés pour repérer les secteurs d’Île-de-France qui concentrent les pollutions et nuisances environnementales et mieux connaître les populations concernées. « Ce travail d’identification nécessite d’élaborer des méthodes entièrement nouvelles dans le cas de cumuls d’exposition de natures variées (chimiques, physiques ou encore biologique). Il n’existe pas de méthode unique », exposent les auteurs. Ce travail est le fruit de cinq années de travail. Enjeu : réduire les 7 900 décès qui, selon une étude 2022 de l’Ors Île-de-France et Airparif, pourraient être évités sur le territoire.

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Combinaison des indicateurs des composantes individuelles pour obtenir le score composite d’environnement. © Institut Paris Région

Élaboration d’un score d’interpellation

Afin d’identifier les secteurs à enjeux pour l’action publique, un score d’interpellation a été construit à partir de la combinaison de trois scores intégrant un score d’environnement, un score de sensibilité et un score de difficulté des populations à faire face. Ce score d’interpellation constitue un indicateur composite de risques sanitaires liés aux expositions environnementales. Sa construction s’est déroulée en quatre étapes.

La première consiste à sélectionner des indicateurs individuels : aux cinq composantes initialement mobilisées (qualité de l’air, bruit des transports, pollution des sols d’origine industrielle, installations industrielles, eau destinée à la consommation humaine), une sixième composante liée au cadre de vie a été ajoutée. Elle combine la carence en espaces verts, les caractéristiques urbaines propices à l’îlot de chaleur urbain et celles favorables à la marche quotidienne.

Des mailles de 500 m de côté

Dans une seconde étape, les données ont été transformées et agrégées à la résolution de mailles carrées de 500 mètres de côtés pavant le territoire régional. Soit 48 825 mailles ! Souvent utilisée dans la planification, cette résolution renvoie à la notion d’espace de vie autour du logement. De quoi rendre mieux compte des intensités des expositions. Dans la troisième étape, celle des scores de risques, les indicateurs individuels ont été exprimés sur une échelle mathématique commune en vue de leur agrégation en un indicateur composite. Dans la quatrième étape, celle de la combinaison des scores, des pondérateurs ont été fixés afin de tenir compte des risques sanitaires. Au final, l’indicateur composite de risque résulte de la moyenne pondérée des scores individuels avec un poids trois fois plus importants aux indicateurs plus directement relatifs aux milieux d’exposition : « air », « bruit », « eau de consommation ».

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Carte des secteurs les plus impactés. © Institut Paris Région

Identification objective des zones les plus polluées

Cette méthode scientifique débouche sur un score d’environnement s’échelonnant entre 0 et 100 pour chacune des 48 825 mailles de la région (voir illustration 1). Ce qui signifie qu’un score plus élevé correspond à une probabilité d’impact sanitaire plus élevée. Ce score d’environnement a été cartographié. Il en ressort que les deux tiers des mailles ont un score d’environnement inférieur à 10. « Respectivement, 5 % des mailles ont un score supérieur à 33 et 1 % supérieur à 50. In fine, ces scores composites permettent d’identifier les zones de cumul d’expositions et de nuisances et de hiérarchiser les secteurs les uns par rapport aux autres », résument les auteurs de l’étude. La représentation cartographique (voir illustration 2) fait ressortir la zone urbaine dense ainsi que les couloirs de survol aérien. Sont mis en exergue les secteurs à proximité des plateformes aéroportuaires de Roissy, Le Bourget et Orly, ainsi que les axes importants de trafic routier et plus particulièrement le périphérique parisien, le secteur de Wissous, Chilly-Mazarin et Champlan situé au sud-ouest de l’aéroport d’Orly, celui de la boucle de Seine autour de Gennevilliers ainsi que celui de Mantes-la-Jolie plus en aval.

Bientôt une carte interactive

« Présenté dans un premier temps sous forme de cartes régionales, ce diagnostic constitue une première base pour une analyse locale du contexte et des enjeux de santé environnementale, relèvent les auteurs de l’étude. Ainsi peut-il être intégré aux réflexions et décisions sur l’aménagement (documents d’urbanisme, projets d’aménagement…) et aux diagnostics préalables à l’élaboration des plans régionaux et locaux en santé publique (plan régional santé environnement, contrats locaux de santé, projet régional de santé…). » Afin de renforcer l’appropriation de ce diagnostic par les différents acteurs, une carte interactive, à la fois outil d’interpellation et d’analyse, va être développée dans un second temps. Cet outil de visualisation précisera les caractéristiques des expositions environnementales à différentes échelles de territoire. Connaître, de façon scientifique, les facteurs de risques présents et leur importance relative permettra, au bout du compte, d’identifier les leviers d’action adaptés.

Erick Haehnsen

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