Les fabricants et fournisseurs de vêtement de travail et d'équipement de protection individuelle proposent des solutions connectées pour mieux prévenir les risques. Il s'agit notamment de prévenir les porteurs de l'arrivée d'un engin ou de les aider à respecter les distances sociales afin d'éviter la contamination au Covid-19.
Pour contrer la concurrence des produits Low Cost, les acteurs européens du marché des EPI se sont concentrés sur une offre qualitative et innovante. Notamment en France où le marché pesait 1,3 milliard d’euros en 2019 avec une croissance moyenne de 2,5 % par an, selon le cabinet d’études Xerfi. La stratégie d’innovation des acteurs se traduit depuis ces deux-trois dernières années par l’arrivée de solutions multifonctions.
A l’image de ces parkas, gilets et autres vestes haute-visibilité qui avertissent les utilisateurs de leur proximité avec des engins. L’enjeu étant d’éviter les collisions mortelles et d’encourager le port d’EPI. Citons aussi ces gilets qui sonnent l’alerte si l’opérateur ne respecte pas les règles de distanciation sociale. De quoi limiter le risque de propagation du Covid-19.
Parade commercialisera courant de l’été ses chaussures connectées
En complément de ce rapide panorama, citons les chaussures connectées Parade Connect. Particularité, elles donnent l’alerte en cas de chute lourde et brutale du porteur, grâce à une application smartphone Android disponible sur Google Play. Une solution que le fabricant Parade (110 personnes réalisant 23 millions d’euros de chiffre d’affaires) s’apprête à commercialiser dans le courant de l’été.
Cette filiale du groupe français Eram s’adresse surtout aux travailleurs isolés. Une population de plus d’1,5 million de professionnels. Sorties de son usine de Jarzé (Maine-et-Loire), les chaussures connectées de Parade embarquent dans leur talon différentes technologies renfermées dans un boîtier. A savoir, un algorithme, un capteur de présence du pied et un accéléromètre pour capter les mouvements du porteur.
Alerte transmise par SMS ou mail
Lorsqu’elle détecte une chute importante et brutale, la chaussure vibre et communique via Bluetooth avec l’application Parade Connect. Dès lors, un serveur vocal interactif appelle alors le porteur pour vérifier s’il a besoin d’aide. Si ce dernier ne répond pas, ou s’il confirme avoir besoin d’assistance, une alerte sera envoyée aux contacts préalablement désignés. « Le message transmis par SMS ou mail fournira la géolocalisation du smartphone du porteur afin de dépêcher les secours », explique Véronique Prézelin, responsable marketing et digital chez Parade. Vendues sur le site Parade Connect, ces chaussures de sécurité connectées seront proposées avec un abonnement mensuel.
Un projet de recherche européen sur la protection des travailleurs
Pour développer cette technologie, Parade a fait appel à plusieurs partenaires. Dont Scalian un groupe de conseils spécialisé dans la transformation digitale, les systèmes numériques et la performance des organisations. Ce dernier pilote un projet auquel Parade s’est associé. Il s’agit de recherches menées dans le cadre d’un programme européen consacré au travailleur augmenté pour l’usine 4.0 du futur. Baptisé « Octopus », ce projet vise notamment à détecter voir à prévenir en temps réel les situations critiques pour un individu. Et ce, grâce à des capteurs physiologiques et environnementaux.
Eviter les risques de transmission du Covid-19
Outre la détection de chutes brutales, les EPI connectés s’intéressent depuis peu au respect de la distanciation sociale. L’enjeu étant d’éviter les risques de transmission du Covid-19. En témoigne la solution Kyd 42 pour Keep Your Distance proposée par le français Cad42.
Créée en 2016, cette start-up de 8 personnes dont 7 ingénieurs viennent du monde du logiciel. Ses solutions visent à automatiser l’interconnexion entre la maquette numérique et les objets connectés. L’enjeu étant d’optimiser la production industrielle mais aussi de prévenir les risques.
Précision de 10 cm
Dans cette perspective, elle propose différents objets connectés au service de la sécurité des opérateurs. Notamment pour les prévenir de la proximité d’un engin ou d’une zone dangereuse. L’offre de Cad42 s’étoffe désormais avec les Kyd 42.
Ces boîtiers fonctionnent sur une technologie Ultra Wide Band (UWB) . Ce qui permet d’obtenir une précision de 10 cm. Autre avantage, ces boîtiers ne pèsent que 75 grammes. Du coup, ils peuvent se glisser dans des casques ou des gilets afin de mesurer les distances entre deux porteurs.
Bientôt un casque connecté
L’enjeu étant de leur rappeler l’obligation de garder leur distance par des alertes sonores ou lumineuses. Lesquelles se déclenchent en cas de non respect. « Ces dispositifs ont été testés par des opérateurs sur un chantier du groupe Colas », indique Jean-Philippe Panaget, co-fondateur et président de Cad42. La PME a mené plus d’une centaine de tests jusqu’à présent avec ces dispositifs. Plusieurs milliers de produits sont en commande.
Dans la foulée, des casques intégrant la technologie Kyd 42 devraient suivre. Ces produits résultent d’un partenariat avec un fabricant anglais d’EPI. L’intégration du boîtier dans le casque pourrait valoir à cet EPI connecté d’être certifié sachant que le boîtier est estampillé CE.
Partenariat entre Kiloutou et T2S
Les outils de distanciation sociale promettent de se multiplier notamment grâce au loueur Kiloutou. Le spécialiste de la location de matériel pour le BTP compte 550 agences majoritairement en France. A l’origine, le loueur propose depuis un an un dispositif connecté. il s’agit de prévenir les risques de collision des opérateurs avec des engins.
Il se compose d’une balise RFID extérieure avec alarme sonore et lumineuse embarquée dans le véhicule. De leur côté, les piétons portent un gilet « haute visibilité » connecté via un badge RFID. En cas de danger, le piéton reçoit une alerte visuelle délivrée par les 11 Leds de son gilet. Mais aussi un signal sonore et un effet vibrant.
Convention avec l’OPPBTP
Baptisée « Gilet connecté » de la gamme Kare, cette solution locative découle d’un partenariat noué en 2018 avec le fabricant T2S. La PME produit des équipements de protection haute visibilité. Cette solution vise à assurer la sécurité et la visibilité sur les chantiers. « Ce système connecté repose sur la vigilance partagée », fait valoir Vincent Royer, directeur de la transformation numérique chez Kiloutou.
Le loueur a signé une convention avec l’OPPBTP pour une durée de quatre ans. Elle prévoit la mise au point d’un protocole d’évaluation, le développement de la solution technique en phase avec les exigences du terrain. Mais aussi l’accompagnement des utilisateurs afin de favoriser l’acceptabilité et l’appropriation du système.
14 sites en cours de déploiement
La convention prévoit aussi l’amélioration des performances et de l’ergonomie du dispositif sur la base des retours d’expérience. « Nous avons mené depuis un an plusieurs tests sur différents sites et nous nous attelons avec un de nos clients à un déploiement d’envergure sur 14 sites spécialisés dans le traitement et la valorisation des déchets », rapporte Vincent Royer en rappelant que la collision entre piéton et engin constitue la deuxième cause de mortalité.
À l’heure du Covid-19, les boîtiers du gilet ont bénéficié d’une mise à jour. Objectif, leur apporter une fonction supplémentaire de distanciation physique. Un de ses clients l’a mis en test avec une dizaine de personnes. « Pour l’avenir, on peut imaginer d’autres applications pour prévenir l’opérateur quand il rentre dans une zone de froid ou exposée à des gaz dangereux », indique le directeur de la transformation numérique de Kiloutou.
Prévenir l’apparition de TMS
En dehors de la distanciation sociale, la prévention anti collision ou la détection d’hommes morts, les boîtiers connectés servent aussi à améliorer le bien-être au travail. En témoigne, le français Mulliez-Flory (103 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 910 employés dont 230 en France).
L’entreprise spécialisée dans les vêtements de travail propose un dispositif pour mesurer les gestes et postures et anticiper ainsi les TMS. Cette solution repose sur des capteurs intégrés dans une veste, blouson t-shirt ou tout autre vêtement et reliés à un enregistreur.
Un nouveau Dati d’ici 12 à 18 mois
« Ce boîtier collecte les données et les transmets à un PC par Bluetooth ou par câble », indique Thomas Poulin, responsable innovation chez Mulliez-Flory. Cette solution commercialisée depuis un an résulte d’un partenariat avec une entreprise d’ingénierie. En l’occurrence Altran qui a développé le logiciel de traitement des données.
« Une nouvelle version va sortir avec d’autres capteurs permettant d’accroître les informations sur le quotidien du porteur », fait savoir le responsable innovation de Mulliez-Flory. Laquelle phosphore parallèlement sur un projet de boîtier connecté pour les travailleurs isolés qui devrait sortir d’ici 6 à 12 mois.
Eliane Kan
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