Gardiennage, vidéosurveillance, sûreté aéroportuaire, surveillance de sites sensibles ou des événements… Les agents de sécurité privée n’exercent que s’ils sont titulaires d’une carte professionnelle. Tous les cinq ans, ils doivent valider leurs acquis. À l’heure de l’agent connecté, leur valeur n’est pas toujours reconnue à sa juste hauteur.
En 2020, les missions des 175 000 agents de sécurité sont larges et variées. En effet, ils assurent l’ensemble des services de sécurité et de sûreté liés à la prévention et à la dissuasion. À savoir le gardiennage, la vidéosurveillance, la sûreté aéroportuaire, la surveillance de sites sensibles et la sécurisation des événements. Ainsi que le transport de fonds et la protection rapprochée des personnalités, etc. Leurs missions auraient à s’étoffer davantage afin de rendre le secteur plus attractif aux nouvelles recrues motivées et compétentes. En tout cas, c’était l’esprit du rapport de la mission parlementaire sur le continuum de sécurité. Deux députés LREM, l’avocate Alice Thourot (Drôme) et Jean-Michel Fauvergue (Seine-et-Marne), ex-patron du RAID, l’avaient remis au Premier ministre le 11 septembre 2018.
Les promesses alléchantes du rapport Thourot-Fauvergue
Parmi les 78 mesures proposées, ce document préconise de rétablir la crédibilité du secteur. Objectif : restaurer la confiance auprès des clients (entreprises, institutions…) et de la société. L’idée consiste à accroître les efforts en termes de recrutement et de formation. Au menu, des enquêtes de moralité approfondies, contrôle amélioré des organismes de formation, une habilitation plus efficiente des formateurs qualifiés. Le rapport parlementaire veut aussi valoriser l’image du secteur afin d’attirer les talents. Il s’agit ici que les personnels se sentent reconnus dans leurs missions. Et de les conforter dans le sentiment qu’ils contribuent à protéger leurs concitoyens. Ensuite, les auteurs évoquent l’éventualité d’armer certains professionnels investis de missions de sûreté dangereuses. Enfin, les députés mettent l’accent sur la « coproduction de sécurité ». C’est-à-dire entre les forces de sécurité d’État (police et gendarmerie nationales), la police municipale et les sociétés de sécurité privée. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Un immobilisme critiqué
« Rien n’a changé, déplore Danièle Meslier, présidente de l’ADMS (1) qui rassemble 105 adhérents dans tous les métiers de la sécurité. Les auteurs du rapport essaient de relancer le continuum mais rien ne se passe. » Bref, les rôles, les attributions et la place de chacune des forces de sécurité restent en l’état. Le dispositif de sécurité globale expérimenté avec succès lors de l’Euro 2016 ne se pérennise pas. Quant à l’armement des agents de sécurité, il reste en berne. « Difficile pour les organismes de formation d’obtenir l’agrément du CNAPS (2). Entre autres, nous n’avons pas de formateur ni les moyens d’investir dans des lieux spécifiques d’entraînement. Nous ne pouvons disposer des stands de tir de la police ou de la gendarmerie », reconnaît Franck Delmas, directeur d’Occitanie Pro Formation, un centre de formation aux métiers de la sécurité privée basé Montauban (82).
La fiche sanitaire « Agent de sécurité » rédigée sans la profession
Concernant le Covid-19, le ministère du Travail a, certes, rédigé une fiche sanitaire « Agent de Sécurité ». La FFSP (3) avait proposé de collaborer avec les services du ministère du Travail. « Cependant, aucune organisation professionnelle n’a été consultée, reprend Danièle Meslier. Or nous alertons les dirigeants d’entreprises de sécurité privée sur un risque. Celui d’avoir à faire face à des droits de retrait massifs de la part de leurs salariés. Notamment en cas de non-respect des protocoles sanitaires. De la part tant des donneurs d’ordre que des entreprises privées de sécurité. »
À cet égard, l’ADMS a rédigé avec le soutien de la FFSP le label « Prévention Covid-19 et respect des mesures sanitaires ». Ce jeudi 4 juin, ce label se concrétise par l’inauguration d’une formation qu’a conçue Occitanie Pro Formation. Dans la foulée, l’ADMS cherche à assermenter les agents de sécurité. Notamment en raison du déconfinement : « L’inspection du travail réclame de respecter les gestes barrières. Dans certaines entreprises, des agents de surveillance aident à les faire respecter. Mais, face à un récalcitrant, ils ne peuvent rien faire », poursuit Danièle Meslier.
Des belles perspectives d’évolution
Les diplômes démarrent au CAP Agent de sécurité ou CAP d’Agent de prévention et de médiation. Sans oublier la mention complémentaire (MC) Sûreté des espaces ouverts au public. Puis, viennent BP Agent technique de prévention et de sécurité ainsi que le Bac Pro Sécurité-Prévention. On compte aussi le Titre professionnel d’Agent de sûreté et de sécurité privée (TP ASSP). Ainsi que le Titre Professionnel d’Opérateur de station centrale de télésurveillance (TP OSCT) et le Certificat de qualification professionnelle Agent de prévention et de sécurité (CQP APS). Pour, l’agent de sécurité, les perspectives d’évolution sont importantes. Il peut se spécialiser en tant qu’opérateur de télésurveillance, agent de sécurité cynophile (maître-chien), rondier intervenant. Ou agent de prévention des vols, voire agent de sécurité incendie. Avec de l’expérience, l’agent de sécurité peut devenir responsable de site ou chef d’équipe de sécurité.
La professionnalisation des métiers s’intensifie
Reste que le CNAPS a considérablement changé le paysage de la profession. En effet, l’organisme a délivré l’an passé 75 546 cartes professionnelles, 40 489 autorisations préalables et 15 145 agréments « palpation ». Ainsi que 2 834 agréments dirigeants, gérants et associés. Sans compter les 1 867 autorisations d’exercer délivrées pour des établissements principaux et secondaires d’entreprises de sécurité privée. Rappelons que les cartes professionnelles obligatoires sont valables cinq ans.
Depuis le 1er janvier 2018, tous les agents de sécurité privée doivent suivre une formation continue. Conséquence : les demandes de renouvellement de cartes professionnelles sont conditionnées à un stage de Maintien et d’actualisation des compétences (MAC). « Cette obligation de la formation initiale et des MAC intervient dans les différents métiers de la sécurité privée. Les agents cynophiles, les télésurveilleurs, la protection de personne… L’obligation de ces formations intensifie la professionnalisation des métiers et participe de l’assainissement du secteur », constate Ludovic Bustos, dirigeant de la société CSI Sécurité qui emploie une centaine de salariés.
Les limites pénalisantes du CNAPS
Cependant, les effectifs du CNAPS ne sont pas à la hauteur de l’ampleur de ses tâches. « Ses délais de réponse sont beaucoup trop longs. Nous pouvons attendre jusqu’à six mois pour que le CNAPS valide les cartes professionnelles ou les autorisations préalables. Ce qui pénalise des demandeurs d’emploi motivés pour entrer en formation, regrette Ludovic Bustos. Pendant ce temps, ils restent à Pôle emploi car les entreprises ne peuvent envoyer en mission des salariés qui ne sont pas titulaires de carte professionnelle. Cela génère du découragement ou des réorientations professionnelles. »
Vers l’agent connecté
Autre évolution marquante dans les métiers d’agent de sécurité, les applications de rondier électronique, main courante électronique combinant un dispositif de protection des travailleurs isolés (Dati). « Avec les applications de rondier sur smartphone, on informe le client que la mission est bien exécutée. On peut aussi garder une trace précise et horodatée des différentes rondes qu’il a faites, souligne Ludovic Bustos. Effraction, fuite d’eau, départ de feu, dégradation… Si l’agent détecte une anomalie, il prend une photo et transmet sur la main courante. À savoir son constat, le compte-rendu et la photo associée. »
Ces applications d’agent connecté ne changent pas le métier. Mais, à l’instar des formations obligatoires, elles contribuent à la professionnalisation du métier et à la transparence du travail effectué. Tant vis-à-vis du donneur d’ordre que de l’entreprise de sécurité privée. Outre la garantie de service, les applications connectées contribuent à la sécurité de l’agent en tant que travailleur isolé. Reste que ces équipements réclament d’accéder à une source d’électricité pour leur recharge. Ainsi qu’à des locaux sécurisés pour les stocker. Des contraintes qui ne conviennent pas à toutes les missions.
Accéder aux deux premières parties de la série : Métiers de la Sécurité
Erick Haehnsen
(1) Association nationale des métiers de la sécurité
(2) Conseil national des activités privées de sécurité
(3) Fédération française de la sécurité privée
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