Surtout focalisés sur la prévention de la violence, les chefs d’établissement minimisent les risques qui les entourent. Fort heureusement, le nombre de décès par an est très faible et relève majoritairement d’activités sportives.
En France, on dénombre plus de 12 millions d’élèves scolarisés dans 54 000 écoles et environ 11 000 lycées et collèges. La sécurité des biens et des personnes est de la responsabilité du directeur des écoles et des chefs d’établissement dans les collèges et lycées, et ceci, bien sûr, en lien avec les collectivités propriétaires des locaux. Or, au quotidien, l’attention de ces dirigeants est davantage mobilisée sur la prévention de la violence physique ou verbale. « Les établissements scolaires ignorent les autres risques qui les entourent », soulève Jean-Marie Schléret, président de l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement. « Ils se sentent en général bien protégés car le nombre de décès est très faible, soit une quinzaine de décès dus pour les 3/4 à une activité physique ou sportive. »
Chute mortelle
Pourtant d’autres risques existent. Outre le risque incendie (lire l’encadré), qui se traduit par une vingtaine d’incidents par an, citons les risques dus aux catastrophes naturelles (tempêtes, tornades, séismes) sans oublier les dangers liés au défaut d’entretien du bâtiment. Certains accidents se sont révélés mortels. A l’exemple de ce lycéen qui a effectué, en 1999, une chute mortelle en se suspendant à un auvent défectueux. Pour éviter de tels drames, l’Observatoire et Jean-Marie Schléret recommandent aux établissements d’investir 15 euros/an/m2 dans l’entretien des bâtiments. Par ailleurs, il recommande aux propriétaires des établissements de recourir à un organisme vérificateur agréé tel que l’Apave, Bureau Veritas, ou Socotec pour contrôler tous les cinq ans leurs installations (garde-corps, huisseries, rampes d’escalier, équipements sportifs, etc.).
« Chaque année nous menons des vérifications qui portent, entre autres, sur les installations électriques et de chauffage, la détection incendie », indique Christophe Canu, directeur Métier Exploitation chez Bureau Veritas « Ce contrôle est important pour la sécurité des personnes car il peut y avoir des risques d’incendie liés au chauffage ou des risques d’intoxications au monoxyde de carbone lié à l’encrassement des conduits de cheminée. » Bureau Veritas conseille d’ailleurs aux nouveaux chefs d’établissement de se référer au registre de sécurité dans lesquelles sont consignées toutes les interventions liées à la maintenance. Ce qui permet de savoir si toutes les opérations d’entretien ont bien été effectuées, si les exercices d’évacuation ont été menés, d’identifier le personnel qui a été formé à l’utilisation des extincteurs ou qui possède son brevet de secourisme.
Risques majeurs
L’occasion aussi de consulter le Plan particulier de mise en sécurité (PPMS). Ce document rédigé par les directeurs d’école et les chefs d’établissement doit recenser tous les risques majeurs d’origine naturelle, technologique ou humaine. Grâce à ce document, le responsable de la sécurité saura quand et comment déclencher l’alerte, quelles consignes appliquer dans l’immédiat ; où et comment mettre les élèves et les personnels en sûreté et comment gérer la communication avec l’extérieur.
A cette démarche s’ajoute pour le chef d’établissement l’obligation depuis 2009 de réaliser un diagnostic de sécurité qui vise à sanctuariser l’école de manière à protéger les élèves contre la violence. Selon l’enquête Système d’information et de vigilance sur la sécurité scolaire (Sivis) 2010-2011 réalisée auprès de 6 300 établissements, on déplore 12,6 incidents graves déclarés (pour 1 000 personnes) contre 11,6 sur la période 2007-2008. A cette même époque, les atteintes aux biens (vols, dommages aux locaux et aux biens personnels) représentaient 15,4 % des incidents déclarés contre 11,7 % en 2010-2011.
Le feu, première source de préoccupation
« En matière de sécurité, le risque incendie constitue notre première préoccupation », explique Jean-Marie Schléret, président de l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement.
« Ces phénomènes sont toutefois très limités puisqu’on ne dénombre qu’une vingtaine d’incendies par an – il s’agit principalement de débuts d’incendie, contre quelque 100 000 incendies domestiques. » Pour autant, un incendie peut arriver à tout moment. D’où la nécessité de se montrer très vigilant en s’assurant que rien n’entrave l’ouverture des portes et en veillant au bon fonctionnement des extincteurs, détecteurs de fumée, alarmes et systèmes de désenfumage.
« Rien ne vaut la présence humaine », martèle le président qui recommande aussi de veiller à la bonne formation du personnel. Il faut aussi s’assurer que les exercices d’évacuation sont bien effectués deux fois l’an (le premier doit avoir lieu durant le mois de la rentrée), afin d’entraîner les élèves à affronter ce type de situation. Concernant la sécurité des personnes handicapées, chaque étage doit être pourvu d’une zone d’attente sécurisée, comme le prévoit la réglementation de 2010. En cours de mise en place, ces espaces sont destinés à attendre les secours. « Ils doivent donc comporter des parois, portes et ouvertures ayant une tenue aux flammes et aux fumées deux fois plus importantes que dans les autres salles. »
14 000 préconisations
Cette baisse est sans doute liée aux mesures de protection des écoles adoptées avec l’appui des équipes mobiles de sécurité (EMS) implantées dans toutes les académies. Leur mission est triple. Il s’agit de prévenir les tensions, d’intervenir immédiatement en cas d’incident grave et de protéger les personnes et les biens. En 2010, plus de la moitié de leurs 16 000 interventions ont été consacrées à la formation du personnel à la sécurité et à l’élaboration ou à l’actualisation des diagnostics de sécurité. Il s’agit d’un état des lieux sur les mesures de protection qui entourent l’Etablissement public local d’enseignement (EPLE) et une analyse des données de vie scolaire.
Selon le site du ministère de l’Education nationale, les diagnostics de sécurité ont donné lieu à plus de 14 000 préconisations recensées en septembre dernier. Lesquelles portent majoritairement sur la surveillance des abords de l’école, le déploiement de clôtures et de systèmes anti-intrusion, sans oublier, bien sûr, l’installation de vidéosurveillance au niveau des accès.
Les EPLE en chiffres
> A la rentrée 2011, les EPLE ont accueilli un peu plus de 12 millions d’écoliers, de collégiens et de lycéens en France métropolitaine et DOM.
> 6,66 millions d’élèves sont scolarisés dans les établissements
du premier degré, 3,25 millions dans les collèges et 2,12 millions dans les lycées
(dont 702 000 en lycées professionnels).
> On dénombrait 201 400 élèves handicapés scolarisés en milieu ordinaire, à la rentrée 2010. Pour cette période, la France dénombrait 65 093 écoles, collèges et lycées publics et privés. Dont 53 798 écoles, 7 018 collèges et
4 277 lycées, dont 1 637 lycées professionnels.
Source : ministère de l’Education nationale.
De cinq à 20 caméras par lycée
« La vidéoprotection bénéficie depuis septembre dernier d’une circulaire (en l’occurrence celle du 14 septembre 2011 N.D.L.R.), qui favorise son déploiement dans le milieu scolaire », indique Patrice Ferrant, directeur commercial de Mobotix, un des plus gros fabricants mondiaux de caméras de vidéosurveillance. Un marché qui a de l’avenir.
« A peine 20 % des établissements scolaires en sont équipés », selon ce responsable commercial qui propose des caméras haute résolution de 3 mégapixels qui apportent 30 fois plus de détails que les modèles analogiques et fonctionnent de jour comme de nuit avec des champs de vision allant jusqu’à 360 degrés. Ce qui intéresse notamment la surveillance des abords, des lieux isolés (préau, salle de gymnastique, parking, etc.) mais aussi des pièces sensibles comme les salles informatiques.
En cas de vol de PC, il suffit de pointer le curseur à l’endroit où le matériel était installé pour que la vidéo recherche automatiquement les images de l’appareil manquant.
« Idem quand on détecte un tag sur un mur », poursuit Patrice Ferrant qui constate que le prix des systèmes vidéos a baissé. Soit de 1 000 à 1 500 euros par point vidéo sachant qu’il faut compter de cinq à 10 caméras en moyenne dans les collèges et de cinq à 20 dans les lycées. Ce prix n’inclut pas la connexion au réseau. A cet égard, lorsqu’un établissement est déjà pourvu d’un réseau informatique, il peut y connecter les caméras ce qui évite d’avoir à tirer des câbles supplémentaires.
Portique de sécurité
Pour autant, il faut rappeler que l’installation de caméras à l’intérieur des bâtiments est soumise à l’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Laquelle peut se montrer pointilleuse dès lors que les dispositifs filment en permanence des lieux de vie tels que la cour de récréation, le préau ou le foyer des élèves. L’an dernier, cinq établissements ont d’ailleurs été mis en demeure de modifier leur installation par la Cnil. Laquelle estime que de filmer en continu des élèves et des enseignants ne se justifie que dans les seuls établissements victimes d’actes de malveillance fréquents et répétés.
Dans les cas les plus extrêmes, la sanctuarisation des écoles peut nécessiter l’installation d’un portique de sécurité. Ce système a d’ailleurs été préconisé dans 2 % des 182 EPLE les plus sensibles de l’Hexagone. Sans aller jusqu’à la détection de métaux, l’installation de systèmes de contrôles d’accès n’est plus l’apanage des établissements les plus dangereux. De plus en plus d’institutions privées désireuses de protéger leurs élèves et de rassurer les parents sautent le pas. C’est notamment le cas de cet établissement privé d’Evreux où les élèves sont priés de passer leur badge d’identification afin de franchir le tourniquet de l’école. Efficace pour lutter contre les intrusions, ce système de filtrage présente un inconvénient, c’est qu’il crée des files d’attente. Le franchissement du portique étant limité à une vingtaine de personnes à la minute et par portique, cela nécessite de multiplier le nombre de dispositifs à mettre en œuvre. « Du coup, il ne peut être déployé que dans les petits établissements », souligne Marcel Lagniez, en charge du marché des écoles chez Synel Industrie, groupe industriel de 350 personnes.
SMS envoyé aux parents
Spécialisé dans la gestion du temps de travail et le contrôle d’accès, il conçoit et installe des équipements dans les entreprises et les établissements scolaires. Il a ainsi équipé entre 200 et 250 écoles, collèges et lycées en Europe avec des solutions qui concilient sécurité et gestion du temps de présence des élèves. Comme l’illustre le lycée privé Saint-Vincent de Rennes, qui compte
2 300 élèves et 400 enseignants et personnels administratifs. L’accès à l’établissement est protégé notamment par quatre portails électriques, des barrières pour les véhicules ainsi qu’un système vidéo d’identification des conducteurs.
S’il n’existe pas de portique piétons à l’entrée de l’établissement, en revanche chacune de ses 274 portes est protégée par un contrôle d’accès actionnable à l’aide d’une carte d’identification détenue par le seul personnel d’établissement. Et ce, à la différence des badges dont sont pourvus les élèves et qui leur servent à différentes applications : imprimer un ticket de retard aux badgeuses (un sis ou un mail est alors immédiatement envoyé aux parents), s’enregistrer pour accéder à une salle de permanence, emprunter un livre au CDI, et se restaurer. Dans ce dernier cas, le personnel vérifie qu’il est bien le propriétaire de la carte grâce à la photo de l’élève qui s’affiche automatiquement sur son écran. Pour Marcel Lagniez, ces dispositifs vont se développer car ils constituent un facteur de différenciation pour les établissements privés qui souhaitent apporter aux parents d’élèves des services à valeur ajoutée.
© Eliane Kan/Agence TCA
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