Quelques mois après son entrée en vigueur, qu’est-ce que le règlement e-IDAS ?
e-IDAS signifie Electronic Identification and Services. Ce règlement européen, n° 910-2014 du 23 juillet 2014; est entré en vigueur en juillet 2016. Il vise à promouvoir les services de confiance relatifs à l’identité numérique comme l’horodatage, la signature et le cachet électroniques, la lettre recommandée… Le tout afin de favoriser la dématérialisation des échanges dans toute l’Europe. Ce dispositif repose principalement sur des prestataires de service de confiance [Trust Service Provider (TSP)] qui s’engagent à proposer des produits qualifiés par e-IDAS, gage de reconnaissance dans l’Union européenne. L’adoption de ce règlement confirme l’engagement des dirigeants européens en faveur de la dématérialisation des dispositifs de reconnaissance et d’identification, dans une économie toujours plus numérique.
Hier encore, pour signer un contrat par exemple, il suffisait d’une feuille de papier et d’un stylo. Comment faire aujourd’hui, quand la majorité des documents sont générés directement par des systèmes informatiques ?
Dans les faits, les documents électroniques sont imprimés, signés à la main puis numérisés pour retrouver leur format initial… la boucle est bouclée ! En effet, le citoyen ne dispose d’aucune technique fiable de signature électronique. C’est donc bien l’identité numérique qui est donc au cœur du règlement e-IDAS.
Quels sont les impacts sur les documents numériques et leur archivage ? Dans 20 ou 30 ans, comment démontrer la conformité d’un consentement signé électroniquement en 2016 ?
Dans le monde numérique, c’est la validité du certificat d’identité du signataire qui permet de vérifier la signature. Un certificat numérique doit être renouvelé tous les 2 ou 3 ans. Quant au dispositif technique qui permet de générer une signature, il doit être renouvelé tous les 5 à 10 ans. On le voit, les moyens techniques seuls ne permettent pas de gérer tout le cycle de vie d’un document. C’est le rôle de l’archivage, qui permet de conserver à très long terme non seulement le document lui-même mais aussi sa signature et les preuves de validité du certificat lors de la signature. Le système de signature à la volée permet de valider un document sans certificat d’identité numérique. Il suffit au signataire de s’identifier et de donner l’ordre à une machine de signer le document à sa place. Pour vérifier la validité de la signature, il est indispensable de conserver l’ensemble des éléments de la transaction afin de prouver les points suivants : qui ? quoi ? Quand ?
Y a-t-il un sens à préserver la signature sans le document ?
Théoriquement, il est possible de conserver le document et sa signature dans deux systèmes distincts. Dans ce cas, les deux éléments seront exigés pour vérifier l’intégrité du document archivé. Les normes d’application e-IDAS préconisent plutôt de conserver un « objet d’archives » regroupant le document et sa signature. Ce dispositif simple offre une meilleure maîtrise du risque à long terme. Aussi est-il recommandé de réfléchir simultanément aux processus de signature et d’archivage, afin de constituer un «objet d’archives » intégrant les éléments de preuve.
Que se passe-t-il entre le moment de la signature et le moment du versement en archivage ?
L’intégrité d’un document numérique est gérée par le système d’archivage électronique (SAE) qui l’exploite, et non par le support du document. La réglementation impose que les documents à vocation probatoire soient conservés dans un système d’archivage électronique répondant aux exigences de la norme NF Z 42-013. La révision de cette norme, qui devrait être publiée au printemps 2017, devrait permettre de détruire les documents originaux une fois numérisés selon un processus encadré. Cette conformité offre un haut niveau de traçabilité, intégrant des journaux chaînés, horodatés et eux-mêmes archivés afin de préserver l’ensemble des preuves d’intégrité.
Comment garantir la vocation probatoire des documents ?
Ce sont ces éléments de preuve, générés par et conservés dans le SAE, qui confèrent leur vocation probatoire aux documents, et non le SAE lui-même. Préserver l’intégrité impose de réduire au strict minimum la conservation des documents dans un environnement peu ou pas sécurisé et de les verser dans un SAE au plus vite après leur signature. Une entreprise qui utilise une Gestion électronique des documents (GED) avec des processus de validation aura donc intérêt à mettre en œuvre un connecteur d’archivage associé au workflow de signature, plutôt que d’attendre plusieurs années avant de verser les documents en masse, comme on l’observe encore trop souvent. Développer son propre système d’archivage en interne nécessite des investissements importants à long terme : infrastructures informatiques et logicielles, moyens humains, procédures, certifications… En cas d’externalisation de ces solutions, il est toutefois recommandé de s’assurer du respect de certaines normes – a minima la certification NF Z 42-013. Lorsqu’il s’agit d’archives publiques, l’agrément du Service interministériel des archives de France (SIAF) est nécessaire. Enfin, l’agrément Hébergeur de données de santé (HDS) est indispensable lorsque les documents contiennent des données de santé à caractère personnel. Le règlement e-IDAS est un véritable progrès juridique. La signature électronique représente un levier conséquent pour la digitalisation des entreprises dans une économie numérique où les processus se dématérialisent. C’est un gage de fiabilité et de sécurité accrue pour les entreprises ou utilisateurs qui y recourent. La signature électronique deviendra, à terme, un gage de confiance aussi sécurisé que la signature manuelle.
Propos recueillis par Erick Haehnsen
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