Les femmes ne sont pas au bout de leurs peines, en particulier sur leur lieu de travail. L’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) tire la sonnette d’alarme dans sa nouvelle étude. Les chiffres sont particulièrement inquiétants : sur la période 2010-2016, les menaces sur le lieu de travail ou d’études ont nettement augmenté à l’égard des femmes. Pour arriver à ces conclusions, l’enquête, menée conjointement par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l’ONDRP et le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), a interrogé plus de 16 000 personnes chaque année.
2015, l’année la plus sombre
Le rapport révèle que le nombre de femmes ayant subi des violences physiques sur leur lieu de travail a presque doublé en six ans, passant de 25 000 à 48 000 par an entre 2010 et 2016. En revanche, dans le détail, 2016 serait moins violente que les années précédentes : avec une hausse importante des violences jusqu’à 2015 (+307%) puis une baisse de 2015 à 2016 (-52%).
La jalousie comme source de conflit
Pour expliquer ces chiffres, l’observatoire met en avant le fait que de nombreux métiers autrefois réservés à la gent masculine se sont ouverts aux femmes. Lesquelles ont fait montre d’un niveau égal de compétences. Surtout en ce qui concerne les postes à responsabilité, qui sont de plus en plus occupés par des femmes, « ce qui peut générer des tensions liées à la jalousie », confie au magazine 20minutes Christophe Soullez, le directeur de l’Observatoire. En outre, « les femmes exercent de plus en plus souvent des professions qui sont davantage exposées au public que celles des hommes. Il y a des lieux où les tensions sont plus importantes, parce que les gens s’énervent quand ils attendent trop longtemps, par exemple. »
Hausse des menaces
Comme si cela n’était pas suffisant, le rapport indique également que les femmes subissent de plus en plus de menaces sur leur lieu de travail. En effet, leur nombre a augmenté de 42,5% sur la période 2010-2016, passant de 167 000 à 238 000. Avec, là encore, une baisse de 24% entre 2015 et 2016. Quoi qu’il en soit, difficile pour l’observatoire d’expliquer les raisons de cette hausse spectaculaire, puis de ce retour à l’accalmie en 2016. « On ne peut pas savoir si cela révèle une augmentation effective des violences physiques ou si c’est une hausse de la déclaration de ce genre de violences », explique Keltoume Larchet, l’auteure du rapport.
Le lieu de travail, lieu de prédilection pour les agresseurs
Le rapport note une hausse globale des violences et menaces sur la période 2010-2016, âges et sexes confondus. Cependant, « il y a une vraie spécificité pour les femmes » par rapport aux hommes, estime Keltoume Larchet. Sachant que les employées et professions intermédiaires sont les métiers où les femmes sont le plus souvent prises pour cible. « Quand on regarde l’évolution des violences ou menaces faites aux femmes survenues dans d’autres lieux comme la rue ou les transports, c’est sur les lieux de travail et d’études que l’augmentation est considérée comme la plus significative », conclut-elle.
Ségolène Kahn
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