Le récent cas d’agression d’un infirmier par un patient, au centre hospitalier du Vinatier à Lyon vient s’ajouter à une longue liste d’actes de violences signalés par les établissements de soins. Selon l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), on comptait en 2012 plus de 11.000 signalements d’agression. Ces violences concernent 12% des établissements de santé dont 42% des CHU et 43% d’établissements de santé mentale qui, par ailleurs, ont utilisé la plate-forme de signalements. Au total, 70% des signalements concernent les atteintes aux personnes et 29% les atteintes aux biens. Comment lutter contre cette violence à l’hôpital et en établissement de soins ? Et comment, dans ces conditions, assurer la sécurité des travailleurs isolés ? Réponses de Cyril Dusfresne, responsable marketing France d’Ascom, un des leaders des solutions pour la protection du travailleur isolé.
Les agressions ainsi que le sentiment d’agressivité sont en hausse. Où se situe le pic ?
Dans les hôpitaux psychiatriques. Mais, dans les hôpitaux classiques, le pic est traditionnellement atteint au service des urgences. Les niveaux d’attente des patients sont très élevés (jusqu’à 5 heures) ainsi que, mécaniquement, les niveaux d’alerte.
Comment expliquer cette violence ?
Il y a plusieurs facteurs. Tout d’abord, le personnel des établissements de soin est l’un des plus féminisé. Et, bien sûr, il est plus facile de s’en prendre à une femme qu’à un colosse. Ensuite, l’hôpital, et notamment le service d’urgence, devient le réceptacle de toute la misère sociale et de la violence qu’elle sous-tend. L’hôpital accueille les SDF, les alcooliques ou les drogués… Et cette très grande violence s’inscrit sur un fond de surcharge de travail car les personnels sont en sous-effectif dans tous les services. Lesquels travaillent en flux extrêmement tendus . Par ailleurs, lorsque les patients service d’urgence attendent plus de 5 heures, ils peuvent avoir le sentiment qu’on ne s’occupe pas assez d’eux. Il y a aussi les problèmes socioculturels : le refus que certaines femmes soient examinées par des médecins masculins, la sur-culture internet qui amène les familles de patients (ou les patients eux-mêmes) à croire qu’elles en savent autant que les médecins, l’attente des patients à être pris en charge à 100% sans en avoir la couverture sociale… A côté de cela, la violence qui part des urgences se décline désormais même dans les services d’un hôpital.
Par extension, retrouve-t-on cette violence et cette agressivité dans d’autres secteurs ?
Nous sommes face à un phénomène sociétal qui se retrouve dans des secteurs comme la banque, les transports… jusqu’au petit commerce. Bref, la majorité des activités en relation directe avec le grand public. En revanche, il est difficile de faire la part entre l’augmentation du nombre des agressions (nombre qui serait en baisse) et la perception généralisée de l’agressivité. Laquelle crée un sentiment d’insécurité de plus en plus oppressant. D’où le progrès des services de télésurveillance même dans les campagnes.
En fait, bon nombre de salariés qui ne sont pas des travailleurs isolés se retrouvent ponctuellement en situation de travailleurs isolés exposés à l’agressivité…
Oui.
Comment assurer la sécurité des travailleurs isolés ?
Il y a d’un côté des équipements reliés à une infrastructure et de l’autre, une organisation à mettre en place avec la DRH. Côté équipements, on assiste à une évolution de la terminologie dans les appareils de mobilité. Dans les années 80, on parlait de systèmes »homme mort » qui générait une alarme en cas de perte de la verticalité ou de l’immobilité du salarié. Dans les années 2000, sont apparus mes systèmes de Protection du travailleur isolé (PTI) mais l’expression a été interdite car ces systèmes mobiles ne protègent pas les salariés. Depuis les années 2010, on parle de Dispositif d’appel pour travailleur isolé (Dati). L’idée est simple : les équipements génèrent des alarmes pour déclencher des processus d’intervention : à tel endroit, il y a un incident, il faut envoyer les secours le plus vite possible. L’incident peut être un malaise, un sentiment d’insécurité ou une vraie situation à risque. Bien sûr, il faut penser à une solution globale : un terminal qui s’intègre aux processus métier et à l’organisation sociale du travail de l’utilisateur. Il ne suffit pas d’avoir un terminal pour régler tous les problèmes. Il faut organiser les secours, désigner les membres qui en composeront les équipes et les maintenir opérationnelles.
Quelles sont les nouveautés ?
Tout d’abord, les Dati peuvent embarquer des solutions métier. Par exemple, pour les infirmières, il s’agit des alarmes que les patients déclenchent dans les chambres, la possibilité de communiquer en téléphonie sur le terminal avec le patient. L’autre évolution est à l’opposé : intégrer les Dati et les applications métier dans les smartphones. Pour l’heure, on y arrive avec Android mais pas avec iOS.
Propos recueillis par Erick Haehnsen
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