Dirigeante du cabinet conseils T3Nel, spécialisé dans les nouvelles technologies appliquées au textile, Christine Browaeys est ingénieure diplômée de INP-Ensimag, titulaire d’une maîtrise de sociologie. Dans cet entretien, elle nous confie qu'elle animera, lors du prochain salon Expoprotection 2020, une conférence sur le thème « Comment concilier complexité des matériaux et circularité des matières ? »
En matière de développement durable, quelles sont les difficultés rencontrées par les fabricants d’équipements de protection individuelle ?
La crise du Covid19 nous montre que les matières synthétiques souvent « bannies » par les entreprises et les utilisateurs s’avèrent irremplaçables et indispensables pour se protéger contre le virus. Je pense notamment aux masques de protection, surblouses et combinaisons jetables.
Peut-on concilier performance et soutenabilité en matière de protection corporelle ?
Le défi, c’est de concevoir des solutions de protection écologiques adaptées à l’être humain, à un coût raisonnable et facilement industrialisable. Les recherches actuelles portent, entre autres, sur de nouvelles chaînes polymères biosourcées à partir de viscose de bambou, betteraves ou dérivés de glucose. Certaines de ces fibres sont déjà commercialisées. À l’instar de Sorona, la fibre de Dupont. A la fois légère et respirante au porté, elle est issue à 37% de ressources renouvelables d’origine végétale.
Quelles difficultés les fabricants doivent-ils encore surmonter ?
Ces nouvelles matières proposent des fonctions inédites, seules ou combinées avec des textiles recyclés. Je pense notamment à l’effet déperlant qui est obtenu en recourant à des composés chimiques nocifs comme les PFC (Perfluorocarbures). L’enjeu pour les fabricants est de remplacer ces produits par des procédés plus respectueux pour l’environnement. De nouvelles techniques émergent à base aqueuse, sol-gel et bioplastiques. Certaines s’inspirent de la nature. À l’exemple de la fleur de lotus dont on reproduit l’effet déperlant et auto-nettoyant.
Les fibres naturelles ont elles encore un rôle à jouer ?
Bien sûr. On assiste d’ailleurs à un retour du lin et du chanvre. Ces plantes ont pour avantage de réclamer moins d’eau et d’intrants que le coton. Par rapport à ce dernier, le lin et le chanvre sont moins chers à produire. En outre, des procédés ont été développés afin d’assouplir leur fibre qui est naturellement très raide. Grâce à ce type d’amélioration, certains pays comme les États-Unis et la Chine en font de la culture intensive. Aujourd’hui, on trouve d’ailleurs de plus en plus de vêtement de travail en lin ou en chanvre associés à du polyester recyclé.
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