Poids, stabilité, résistance aux chocs et aux heurts, arc électrique, ventilation... La recherche du confort de l’opérateur passe par un grand nombre de critères et constitue la priorité des fabricants d’EPI. Objectif : non seulement protéger le salarié mais aussi le faire adhérer au port du casque.
Destiné à être porté en vue de protéger le travailleur contre un risque de choc dû à une chute d’objet et de heurt à la tête, le casque de protection est souvent perçu comme une contrainte. « Comme de nombreux EPI, le casque peut être source d’inconfort, explique François-Xavier Artarit, ingénieur assistance conseil à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Les travailleurs étant peu enclins à le porter, l’employeur doit veiller au port effectif du casque de sécurité industrielle. D’où l’intérêt de leur proposer des produits qui répondent à leurs attentes. Le rôle de l’entreprise est primordial. »
Mais impossible de définir le confort de façon générale car il existe autant de porteurs de casques que de types de casques. Chaque entreprise doit sonder ses salariés et choisir avec eux le casque le plus confortable. Les associer à cette prise de décision, c’est un premier pas vers l’acceptation des EPI. « Ensuite, il s’agit de définir l’équipement adapté à l’environnement de travail : l’opérateur est-il en présence de pièces nues sous tension, de métal en fusion, exerce-t-il en hauteur ? » Des problématiques détaillées dans la brochure ED 993 (téléchargeable sur le site de l’INRS), mise au point afin de faciliter la démarche des entreprises. Pour améliorer confort et sécurité, dans certaines situations de travail, il peut par exemple être intéressant de remplacer les casques de chantier par des casquettes anti-heurts, qui comme leur nom l’indique, ne préviennent pas d’un risque de choc à la tête mais juste d’un risque de heurt.
Poids vs équilibre. A partir donc du moment où l’on propose au personnel des casques lourds, gênants, voire douloureux, l’entreprise fait face à des refus. Les fabricants d’EPI planchent donc de façon incessante sur l’amélioration du confort de leurs produits. « Les porteurs et les porteuses de casques de sécurité industrielle veulent souvent un produit le plus léger possible, indique Jean-Marc Pautrat, président de la commission Tête du Syndicat national des acteurs du marché de la prévention et de la protection (Synamap). Pourtant, ce n’est pas toujours le poids physique qui compte, c’est surtout le confort et la répartition des masses sur la tête. Un casque bien conçu, c’est un casque où il n’y a pas d’effet de balance droite/gauche et devant/derrière. Un casque de 400 g bien équilibré sera plus confortable qu’un autre de 300 g qui ne tient pas en place sur la tête de l’opérateur. »
MSA, le groupe international dont le centre d’expertise en protection de la tête est situé en France à Châtillon-sur-Chalaronne (01), fabrique des casques industriels depuis 50 ans. Le groupe l’a bien compris : le poids ne fait pas tout. « Nous équipons de nombreux pompiers de France et des militaires de l’armée française et personne ne se plaint du poids des casques car sa répartition sur la tête est optimisée », avance Yohan Morel, chef de produits casques industriels au niveau européen. Les innovations ergonomiques ont pour but de limiter les contraintes dues au port du casque et de faire en sorte qu’il soit le plus discret possible. « Nos casques V-Gard ont été modernisés grâce au lancement récent de notre coiffe Fas-Trac III. Le bandeau anti-sueur devient très large et couvre l’ensemble du front, ce qui limite les points de pression. Nous avons aussi travaillé sur le design du tour de tête. La partie arrière du casque, dont la molette de réglage, est située très bas pour améliorer l’équilibre du casque sur la tête. Plus de 90% des clients qui l’ont testé trouvent cette coiffe plus confortable que leur casque actuel. »
Pour des questions de sécurité, c’est l’application qui fait le choix de la calotte, la partie externe en matière plastique. Un électricien choisira une calotte non ventilée pour éviter qu’un fil électrique ne touche sa tête. Pour un opérateur du BTP, l’on choisira une gouttière pour éviter que la pluie ne ruisselle dans le cou. En revanche dans le secteur de la pétrochimie, les casques ne seront pas équipés de gouttière pour pas que les produits ne stagnent pas.
Des casques moins nombreux mais de meilleure qualité. Quels sont donc les freins à la généralisation du port d’un casque de sécurité industrielle ? Selon l’expert du Synamap, Jean-Marc Pautrat, le cœur du sujet est pécuniaire : « Le point de gravité du casque doit se situer dans l’axe longitudinal du corps. Sinon, le déséquilibre provoque une tension des muscles cervicaux. C’est ce qui se passe avec des casques bon marché. Le plastique est de mauvaise qualité, la coiffe peu enveloppante et le confort de l’opérateur n’est guère pris en compte. Mais le casque de sécurité industrielle doit répondre à la norme européenne EN397. Pourquoi l’entreprise achèterait-elle un casque, certes confortable, mais plus cher qu’un casque qui répond quand même à la norme ? »
Et la tendance du marché des EPI de la tête lui donne raison. Depuis cinq ans environ, les prix dégringolent, en France plus que dans les autres pays. En cause, le secteur industriel, confronté à moins d’activité et à l’apparition de plus en plus de distributeurs. « Alors que le nombre de porteurs d’EPI diminue, tous les distributeurs étrangers viennent s’installer en France. Le marché sature ». La stratégie des fabricants est alors de tenter d’élever le niveau de qualité de leurs EPI et d’apporter un maximum d’informations aux utilisateurs, souvent ignorants de la normalisation. L’idée, c’est de s’inspirer du modèle des pays d’Europe du nord, très rigoureux dans le domaine du port des EPI. Le Royaume-Uni, qui compte environ le même nombre d’habitants que la France (65 millions) et qui est beaucoup moins industrialisé, dénombre pourtant 3 millions de porteurs d’EPI, soit trois fois plus que dans l’Hexagone, selon une étude du Synamap.
Ergonomie : la priorité. Outre l’équilibre, le confort est aussi une question de matériaux. « Les plastiques sont également en perpétuelle évolution. Les fabricants utilisent majoritairement du polyéthylène haute densité et la matière plastique ABS, plus résistante aux impacts », reprend François-Xavier Artarit. Stéphane Auboueix, PDG de l’entreprise française éponyme basée à Boulogne-Billancourt (92), a les mêmes préoccupations. « Les opérateurs voudraient des casques qui pèsent 100 grammes mais on arrive aux limites de la restriction de poids. On réfléchit à l’utilisation de matériaux avec des qualités différentes en thermoplastique. Le casque en fibre de carbone peut-il être fabriqué ? On se pose la question mais le coût serait beaucoup plus élevé. »
En plus de la recherche de matériaux innovants, la société allemande Uvex, dont la filiale française est basée près de Strasbourg (67), travaille sur l’ergonomie. « Nous avons lancé la commercialisation en janvier de nos produits « i-gonomics, explique Valérie Muller, responsable produits. L’objectif dans la protection de la tête est de modifier le moins possible le centre de gravité d’un ensemble casque et visière. En position parking, c’est-à-dire lorsque la visière est relevée, celle-ci se situe trop en avant. Cette position sollicite les cervicales. A terme, cela engendre des problèmes de dos. » L’entreprise lance alors un casque léger, Uvex Pheos, avec un système de fixation magnétique : la visière se positionne et s’enlève en deux clips. En position parking, elle épouse la forme du casque sans modifier le centre de gravité de l’ensemble. « Le succès est énorme. Nous avons également travaillé sur le système de ventilation propre à Uvex : une ouverture avant et une ouverture arrière. L’air entre par l’avant et ressort, plus chaud, par l’arrière, dans le sens de la marche. La ventilation du casque est réglable par l’extérieur, alors même qu’il est porté par l’opérateur, pour plus de sécurité. » Le système de fixation magnétique proposé pour la visière existe également avec les coques anti-bruit. La visière existe en plusieurs versions dont des versions arc électrique normées GS-ET-29 classe 1 et 2.
Les accessoires constituent un élément non négligeable de la sécurité des casques. Chez Auboueix, leur dimensionnement a été repensé pour accroître la couverture. Le casque Idra2 par exemple, dispose d’une double calotte à écran intégré pour se protéger de l’arc électrique en électricité basse tension. Le cache-oreille a été également ajouté à la jugulaire. « On a le réflexe de tourner la tête pour se protéger en cas d’accident et c’est l’oreille qui est touchée », argue Stéphane Auboueix. Couverture, ergonomie, performance des matériaux : confort rime avec sécurité.
Caroline Albenois
La personnalisation, nouvelle tendance des casques industriels
Stickers, logos de l’entreprise, le casque devient un vecteur de l’image de société et de la politique de sécurité. Chez Vinci, le leitmotiv s’affiche sur la tête des ouvriers « la sécurité d’abord ». « La personnalisation de nos produits représente 45% des ventes », dévoile Yohan Morel, chef de produits casques industriels au niveau européen chez MSA. Quel que soit le domaine d’activité (BTP, sidérurgie, pétrochimie…), les sociétés veulent être visibles, notamment sur des chantiers qu’elles partagent avec d’autres entreprises. MSA propose la personnalisation à partir d’une commande de 20 casques, ce qui séduit les grosses entreprises comme les petites structures. « A l’occasion de Marseille, capitale européenne de la culture 2013, nous avons, à la demande de la Fédération française du bâtiment des Bouches-du-Rhône, équipé toutes les entreprises qui ont participé à l’événement d’un casque avec un logo représentant sous forme de tag l’acronyme BTP. Ou encore plus récemment, le casque V-Gard MSA a été personnalisé aux couleurs du club de football de l’Olympique Lyonnais dans le cadre de la construction de son Grand Stade. »
Commentez