Avec la réglementation de 2012, la France a été pionnière. Cette position vient-elle d’être détrônée par les États-Unis ?
Cette évolution outre-Atlantique était inévitable. Il s’y passe ce qui s’est passé en France il y a 7 ans : une adaptation de la réglementation pour faciliter l’éclosion du marché de l’usage des drones. Les États-Unis accomplissent ainsi un pas important et rejoignent notre niveau.
Certes, mais la réglementation de la FAA (Federal Aviation Administration) va nettement plus loin que la nôtre car elle autorise la livraison par drones, là où, en France, il n’y a que des expérimentations sur dérogation…
En effet, les Américains annoncent ce type de scénario et on pourrait penser qu’ils prennent plus de risques que chez nous, où les expérimentations sont très encadrées. Cependant, il faut noter que cette recommandation devrait imposer d’équiper les drones de systèmes de sécurité permettant d’assurer des opérations sans risque pour les personnes au sol et pour les autres utilisateurs de l’espace aérien.
Quel en sera l’impact sur les constructeurs de drones ?
Les constructeurs leaders sont chinois. Ils détiennent déjà 70 à 80% de parts de marché. L’impact de la réglementation américaine va donc continuer à les favoriser. Ils sauront adapter leurs produits pour se positionner sur les différents scénarios d’utilisation. Malgré l’apparition probable de nouveaux constructeurs de niche, les Chinois bénéficieront certainement de cette ouverture américaine. Les constructeurs installés aux États-Unis vont également en profiter.
Et pour les opérateurs de service par drone ?
De nouveaux acteurs vont émerger et nous assisterons à la montée en puissance des opérateurs existants. Il devrait sans doute se passer la même chose qu’en France. Fin 2012, on comptait environ 50 opérateurs déclarés à la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC). Aujourd’hui, il y en a plus de 11 000. Près de 70% des drones utilisés par ces opérateurs proviennent de Chine.
Quel sera l’impact de la réglementation américaine sur la sûreté et la sécurité ?
C’est le rôle de la FAA que de mesurer cet impact aussi bien pour les personnes au sol que pour les aéronefs. La réglementation française a particulièrement soigné cet aspect. Connaissant bien la FAA, il y a fort à parier que la sûreté et la sécurité soient bien traitées.
Peut-on voir se développer le terrorisme par drone ?
Cela existe déjà au Yémen, en Syrie ou au Venezuela. Cette réglementation n’aura pas d’influence particulière sur le terrorisme. Ce serait plutôt la technologie qui pourrait inspirer des missions terroristes. La réglementation n’y changera rien.
Qu’en est-il de la cohabitation des drones avec les futurs taxis volants dans les Smart Cities ?
Aucune administration raisonnable ne laissera le désordre se développer ! En revanche, la présence de drones dans l’espace aérien va certainement se densifier. Cette densification va nécessiter la gestion efficace du trafic aérien des drones. Ce qui va réclamer des « tours de contrôle aérien » comme pour les avions. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. On n’en est qu’au stade de la réflexion, bien loin d’une réglementation et des tours de contrôle. On peut imaginer que le réseau cellulaire numérique (GSM), largement présent sur notre territoire, soit en mesure d’offrir ce service de liaison entre les vecteurs aériens et le système de gestion de trafic au sol. Le Conseil pour le Drone Civil (CDC) a mis en place un groupe de travail (GT UTM) à ce sujet.
Quel est l’agenda réglementaire à prévoir ?
Nous n’avons pas de visibilité concernant la réglementation sur le contrôle aérien des drones. En revanche, il va y avoir cette année une réglementation européenne unifiée sur les drones. Pour un opérateur français, l’objectif est de pouvoir réaliser une mission en Allemagne en utilisant le même matériel et le même environnement réglementaire qu’en France.
Propos recueillis par Erick Haehnsen
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