Emmanuelle Turpin-Legendre, experte à l’INRS, explique en quoi les extrapulsations cardiaques thermiques sont la valeur la plus juste pour mesurer les astreintes subies par les salariés.
Tout d’abord, qu’est-ce qu’une astreinte thermique ?
Tout salarié dans une entreprise supporte un environnement : la température et le bruit, par exemple. Ce sont les contraintes. L’astreinte, d’un point de vue physiologique, c’est ce que subit le corps. Comment réagit-il à un environnement de forte chaleur ? Le salarié est ainsi exposé à différents niveaux de risques pour la santé : épuisement avec forte transpiration, malaises, rougeurs, crampes de chaleur, causées par un déficit ionique avec spasmes et enfin, le coup de chaleur, quand la température corporelle dépasse 40°C, avec un risque de décès.
Qui sont les salariés concernés ?
Les salariés exposés à un environnement direct de chaleur, en extérieur ou en intérieur, dans les fonderies, les papeteries. Mais aussi les travailleurs qui portent des combinaisons étanches, qui ne permettent pas l’évaporation de la chaleur corporelle. La personne subit une astreinte thermique alors qu’à l’extérieur il ne fait peut-être que 20°C ou 25°C. On retrouve ces cas dans l’industrie chimique, nucléaire, ou dans les chantiers de désamiantage par exemple.
Que sont les extrapulsations cardiaques thermiques (EPCT) ?
Il s’agit d’une mesure physiologique qui se calcule à partir de l’enregistrement de la fréquence cardiaque (FC). Le salarié porte une ceinture au niveau du torse, avec des électrodes. On mesure une première FC de repos, puis une FC au travail, puis une deuxième FC de repos. Car une partie de l’énergie mécanique qu’une personne met en œuvre pour réaliser l’action se transforme en chaleur. Lors de la 2ème FC de repos, la part mécanique de cette dépense énergétique se récupère dans les trois premières minutes, alors que la partie thermique se récupère plus progressivement. Les EPCT, c’est la différence la moyenne des fréquences cardiaques des troisième, quatrième et cinquième minutes de la 2ème FC de repos et la 1ère FC de repos. Si les EPCT sont inférieures à 20 battements par minute, 95 % des salariés ne seront pas exposés à une astreinte thermique excessive.
En quoi les EPCT sont-elles le meilleur indicateur d’astreinte thermique ?
Les méthodes classiques d’évaluation des astreintes thermiques sont peu adaptées lors des expositions brèves, intenses à la chaleur ou lors du port de tenue étanche. Les EPCT rendent compte avec précision de l’astreinte thermique en général, et en particulier dans les conditions dans lesquelles les outils habituels sont inadaptés ou dangereux. Les EPTC sont un paramètre plus sûr, facile à mettre en place, sensible et facilement supportable pour les salariés. C’est une valeur qui réagit très tôt.
Est-ce un premier pas vers une amélioration des conditions de travail de ces salariés ?
Les entreprises n’ont aucune obligation de mesurer les astreintes thermiques. Si un dirigeant souhaite cependant mettre en place ce type de protocole, il peut consulter la bibliographie de l’INRS à ce sujet. L’interprétation des signaux demande une certaine connaissance mais des experts peuvent se déplacer dans l’entreprise. Le médecin du travail a également les capacités pour mettre au point une évaluation.
Propos recueillis par Caroline Albenois
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