Après s’être intéressé aux lombalgies en 2017, puis aux maladies psychiques en 2018, le rapport « Santé travail : enjeux et actions » de l’Assurance maladie-Risques professionnels (AM-RP) apporte son éclairage sur les cancers reconnus d’origine professionnelle. Lesquels ont vu leur nombre multiplié par 3,6 en l’espace de 20 ans, passant de 540 cas reconnus en 1998 à 1 940 en 2017. En moyenne, on en dénombre environ 1 800 par an en France. L’organisme dresse le portrait des personnes qui en sont affectées. 96% sont des hommes âgés en moyenne de 68 ans au moment de la reconnaissance de leur maladie professionnelle. 80% d’entre eux sont des ouvriers à la retraite et dans 80% des cas, ils résident dans la moitié nord de la France.
Prépondérance des cancers liés à l’amiante
Sur la totalité des cancers d’origine professionnelle, les cas dus à amiante sont sur-représentés. 80% des malades ont été exposés au contact de cette fibre interdite en France depuis 1997. Dans 70% des cas, il soufrent d’un cancer du poumon, et dans 30% des cas de mésothéliomes. en dehors de l’amiante, les autres pathologies concernent les cancers de la vessie, les cancers naso-sinusiens et les leucémies. Selon l’AM-RP, ces pathologies graves sont en lien avec des expositions au benzène, poussières de bois et aux produits « noirs » tels que les goudrons, bitumes et asphaltes. Un peu plus de 50% des employeurs concernés sont des entreprises de plus de 250 salariés travaillant dans la métallurgie (39%), le BTP (24%), l’industrie chimique (9%) et le secteur du bois (9%).
1,2 milliard d’euros par an à la charge des entreprises
La prise en charge des cancers professionnels par la branche AT/MP représente 1,2 milliard d’euros par an à la charges des entreprises. 20% des rentes sont versées directement à la personne malade, tandis que les 80% restants sont versés aux ayants droits. Il s’agit majoritairement des conjoints survivants. Le coût moyen annuel de la rente est d’environ 17 000 euros. A titre de comparaison, les ayants droits bénéficiaires ne représentent que 6% des rentes servies, toutes causes confondues, indique l’AM-RP.
Sous-déclaration des cancers
L’organisme déplore d’ailleurs la sous-déclaration des cancers d’origine professionnelle alors qu’ils sont couverts dans 95% des cas par les tableaux de maladies professionnelles. Les principales raisons invoquées par Marine Jeantet, directrice des risques professionnels de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), sont l’absence d’information des médecins traitants et la méconnaissance des salariés des risques et de leur droits. Ce dernier point constitue d’ailleurs un des sujets prioritaires de la dernière Convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la Cnam pour la période 2018-2022. Il s’agira de renforcer les actions en matière de maintien dans l’emploi des personnes souffrant d’un cancer et de prévenir leur désinsertion.
Mieux prévenir le risque chimique
La prévention à l’exposition des risques chimiques est une autre des priorités de la branche AT/MP pour 2018-2022. Il s’agit, d’une part, d’accompagner les entreprises dans la mise en œuvre des mesures de prévention, d’assurer une veille et, d’autre part, d’améliorer la connaissance des risques et des mesures de prévention mises en place dans des situations mal connues, indique l’Assurance maladie, qui prévoit d’instaurer un dispositif d’aide à la déclaration des maladies professionnelles. Ce dispositif pourrait être généralisé en 2020 au terme d’une série d’expérimentations. Par ailleurs, l’organisme propose aux entreprises l’outil Seirich. Déjà utilisé par 20 000 d’entre elles, il les aide à évaluer le risque chimique.
85 millions d’euros d’aide aux entreprises
Enfin, l’organisme rappelle qu’il décerne des aides financières simplifiées réservées aux entreprises de moins de 50 salariés. Sur la période 2015-2018, en moyenne 4 200 PME et TPE en ont bénéficié pour un total annuel de 26 millions d’euros. Cette année, ce montant sera porté à 35 millions d’euros. 5 000 entreprises vont pouvoir en bénéficier. Enfin, à cette enveloppe de 35 millions d’euros vont s’ajouter 50 millions d’euros au titre de l’aide au contrat de prévention pour les PME de 50 à 150 salariés.
Eliane Kan
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