On ne le dira jamais assez, le travail de nuit constitue une activité à risques élevés pour les salariés. Selon une étude menée auprès de 75.000 infirmières par des épidémiologistes de l’université américaine de Harvard et dont s’est fait l’écho Sciences et Avenir en début d’année, le travail de nuit augmente de 11 % les risques de mortalité. Les premiers effets se feraient ressentir dès les six premières années avec des problèmes impactant principalement les poumons et le système cardiovasculaire. A cela s’ajoutent les risques de cancer du sein, de diabète et de déclin cognitif.
15.4% de la population. Ce constat est d’autant plus préoccupant que le travail de nuit touche, en France, de plus en plus de monde. Selon la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du Travail, il concernait 5 % de la population salariée en 1991, puis 7,4 % en 2012 et 15,4 % en 2015. Soit 3,5 millions de salariés ! Ces professionnels ne travaillent pas tous en hôpital ou en usine. Bon nombre interviennent à l’extérieur des locaux de leur employeur et sont souvent isolés durant leur activité. C’est le cas, entre autres, des agents de sécurité, des personnels d’entretien, des chauffeurs livreurs, etc. « La plupart des accidents physiques que nous enregistrons touchent des professionnels travaillant de nuit », constate de son côté Patrick Tavaris, président de Movework, un éditeur de solutions spécialisées dans la gestion d’activités du personnel détaché.
Cette PME montpelliéraine a créé, il y a 4 ans, la première plate-forme de suivi d’activités et de collecte des données en temps réel pour le secteur du multiservices. « Sur une tranche de 24 heures, nous suivons 92.000 intervenants qui travaillent de jour ou de nuit dans l’assistance à domicile, la maintenance des bâtiments, le contrôle qualité des transports, l’hotessariat ou encore le milieu hospitalier », explique le dirigeant de l’entreprise dont l’activité croit de 25% par an.
Aujourd’hui, Movework fournit des outils d’analyse qui aident les employeurs à superviser l’activité de leurs salariés détachés. Lesquels sont alors équipés d’un terminal mobile ou de type PTI-Dati (Protection du travailleur isolé-Dispositif d’alarme pour travailleur isolé). A l’aide de cette « Scannette » mobile, le salarié est chargé d’indiquer son heure d’arrivée et de départ, de qualifier ces interventions et de remonter d’éventuelles anomalies, etc. Autre avantage, si le collaborateur arrive en retard, l’employeur en sera notifié. Idem s’il n’indique pas qu’il a quitté son lieu d’activité. « Dans ce cas, une alerte sécurité sera transmise à son employeur ou à un service de téléassistance s’il s’agit d’un employé travaillant de nuit », indique Patrick Tavaris.
Anticiper les risques. Movework commercialise son offre sous forme d’abonnement facturé entre 4 et 8 euros par mois, selon la taille de l’entreprise. Le service comprend aussi la fourniture d’outils d’analyse et de diagnostic. « D’ici deux ans, en plus d’améliorer leur qualité de services, nous fournirons aussi des outils prédictifs qui aideront les entreprises à anticiper les risques », prévoit le dirigeant qui consacre en R&D plus de 36 % de son chiffre d’affaires. Lequel s’élèvera pour 2015 à 1,5 million d’euros (en croissance de 25 % par rapport à 2014) avec une trentaine de salariés dont 18 en France – le reste étant réparti dans des filiales basées, en Allemagne, en Espagne et au Portugal.
L’entreprise, qui revendique la place de leader en Europe, prévoit de gagner de nouvelles parts de marché sachant que sa solution est traduite en cinq langues. Par ailleurs, elle a pour autre projet de connecter son terminal PTI-Dati à des objets connectés. A commencer par un bracelet de suivi du rythme cardiaque afin de mieux comprendre le comportement de l’homme au sein de ses activités et permettre à terme d’alerter l’employeur en cas de malaise par exemple. Un risque particulièrement élevé chez les employés travaillant de nuit.
Eliane Kan
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