Conçu initialement pour protéger les salariés des salissures liées à leur activité, le Workwear s'inspire de plus en plus du Sportwear. Plus résistant et confortable, il adopte de nouvelles coupes pour séduire les jeunes générations qui n'hésitent plus à enfiler leur « bleu de travail ».
A l’instar des chaussures de sécurité, le Workwear, autre nom donné au vêtement de travail, tend à se fondre dans notre quotidien avec ses lignes inspirées du Sportwear ou du sport de plein air. A la différence des équipements de protection individuelle (EPI), les nouveaux « bleus de travail » ne visent pas à protéger les salariés contre les risques vitaux. Mais à leur assurer une protection contre les salissures occasionnées par leur activité. En dehors du transport et de la logistique, les principaux utilisateurs de Workwear opèrent principalement dans le BTP et l’industrie. Des secteurs sévèrement touchés par la crise. D’où la stagnation voire la baisse du marché des vêtements de travail. Selon un article paru sur le site Brico-Mag, les ventes de Workwear peineraient à atteindre en 2014 les 700 millions d’euros en France. A comparer aux 730 millions d’euros réalisé en 2009 selon le Syndicat national des acteurs du marché de la prévention et de la protection (Synamap).
D’après une étude du cabinet Xerfi, parue en septembre dernier et qui porte sur quelques 85 entreprises réalisant du vêtement de travail et de protection, le marché français est dominé par quelques groupes étrangers comme l’Américain Honeywell, le Suédois Kwintet (Bragard, Clinic Dress, Lafont) et le belge Sioen. La majorité des produits commercialisés sur l’Hexagone sont produits majoritairement à l’étranger. Soit dans des usines en propre, soit chez des sous-traitants basés souvent au Maghreb (Tunisie, Maroc) et en Europe de l’Est en raison des coûts salariaux plus faibles et des délais de livraison courts pour répondre aux clients qui veulent avoir des produits sur stock.
Liberté de mouvement. D’ailleurs, les clients ne veulent pas nécessairement beaucoup de références, rapporte David Guiho, responsable de la stratégie marketing vêtement chez Honeywell Safety Products. Le groupe a récemment décidé de lancer sa propre gamme de vêtements professionnels, HLine, positionnée sur le moyen et haut de gamme. « Nous avons réalisé une étude auprès des utilisateurs qui nous ont fait part de leurs besoins en faveur de vêtements qui soient tout à la fois design, résistants, fonctionnels, confortables et innovants », résume le responsable marketing. Pour tenir compte de ces besoins, la première collection HLine est constituée de pièces disponibles en noir/gris surligné de rappel de rouge. Parmi lesquelles, cette Parka « trois en un » à la fois respirante, chaude et légère, d’une technicité à l’instar des vêtements de sport intensif. Mais aussi ce pantalon conçu pour apporter à son utilisateur un confort extrême, quelle que soit sa position (debout, penchée, accroupie, etc.). Résistant, le pantalon dispose, en complément de renforts Cordura aux genoux, d’un système breveté de poches pour les genouillères amovibles. Enfin, le dos est rehaussé et dispose d’une large ceinture élastique à plat au design original.
De quoi ratisser large chez les utilisateurs. « Les trentenaires réclament des vêtements au look Sportwear tandis que les quinquagénaires s’orientent plutôt vers des produits confortables, pratiques et solides », observe de son côté Jean-Luc Burger, responsable EPI Grands Comptes chez Lyreco, un distributeur de solutions destinées à l’environnement de travail. Selon ce dernier, les employeurs sont demandeurs de produits résistants, d’un bon rapport qualité prix et qu’ils soient aussi vecteurs de l’image de l’entreprise. « Un produit sur deux est estampillé au nom de l’entreprise », rapporte le représentant de Lyreco qui estime que les ventes de Workwear augmentent d’environ 5% dans l’industrie, le tertiaire, la logistique et le BTP. « Nous nous sommes positionnés sur ce créneau il y a trois ans avec une gamme complète de produits en nous appuyant sur l’offre de Delta Plus, de Muzelle Dulac Hasson et de Lafont. »
A cet égard, Lafont fait d’ailleurs figure d’acteur historique puisqu’il opère sur le marché du Workwear depuis 1844. Il garde plus que jamais bon pied bon œil comme en témoigne sa dernière collection Ergo Thermo qui concilie ergonomie et confort thermique pour des professionnels qui évoluent dans des conditions climatiques difficiles. La gamme se compose notamment d’une veste mixte préformée aux manches et au dos. Baptisée Boree, elle se compose de plusieurs textiles. A savoir, un Softshell stretch, un coupe-vent à 3 couches (tissu polaire pour l’isolation thermique, membrane imper-respirante et tissu stretch ultra résistant en face externe). A noter surtout, son jean stretch Notos au look Sportswear et confortable. Taillé dans un tissu Denim stretch Cordura (80% coton 17% Nylon, 3% Lycra), il se distingue par ses genoux préformés, un rehausse dos et un panneau d’aisance à l’entrejambe.
S’étirer en toute liberté. Bien sûr, Lafont n’est pas le seul à s’inspirer du Sportwear. Le français rivalise sur ce terrain avec l’allemand Mewa qui propose deux collections. La première, Trendline, s’adresse aux artisans. Rehaussée de bandes réfléchissantes, elle a été imaginée dans des couleurs contrastées et comporte de nombreuses poches pour ranger les outils de travail ainsi que des protections anti-abrasion et des renforts de genou.
« La seconde collection, Dynamic, convient particulièrement aux besoins des salariés de l’industrie et du bâtiment », indique Gérard Prothais, directeur de Mewa France. « Elle offre une mobilité extrême ainsi qu’une résistance à tout épreuve et présente un design aussi élégant que celui des vêtements du quotidien », fait valoir le porte-parole du fabricant qui estime qu’un Workwear bien coupé fait partie des facteurs de bien-être du salarié. Certains détails ont été particulièrement soignés. Par exemple, les avant-bras de la veste de travail sont munis d’un empiècement sans couture. Cet effet, appelé High-Reach, garantit à l’utilisateur qu’il peut s’étirer sans que la veste glisse vers le haut.
Ligne dédiée aux femmes. Tous les salariés de l’industrie ne sont pas logés à la même enseigne. En matière de Workwear, les femmes, qui ne représentent qu’un tiers des effectifs, font encore trop souvent figure de parents pauvres. Toutefois, certains fournisseurs ont entrepris de rattraper ce retard. A commencer par Initial, filiale du groupe anglo-saxon Rentokil-Initial, spécialisée dans la location-entretien d’articles textiles et d’hygiène, qui habille 1 million de personnes chaque jour en France. L’entreprise a complété son offre destinée aux hommes en lançant en juillet 2014 la Lign’Evolution, premier vestiaire pour femmes travaillant dans l’industrie mais aussi dans la logistique, les garages et autres secteurs d’activité réclamant un contact avec le client.
« Cette collection a été conçue avec notre partenaire Ex Nihilo, un cabinet de design spécialisé dans les vêtements d’image et qui fait partie des cabinets de style indépendants auquel Initial fait appel », indique Laure Brutinaud, chef de groupe Textile chez Initial. « Les coupes de la Lign’Evolution sont plus cintrées afin de mettre en valeur la porteuse tout en s’adaptant à sa morphologie de manière à lui laisser de l’aisance dans les mouvements, ajoute, pour sa part, Marion Jousset, chef de marché Industrie et EPI chez Initial. Par exemple, les poches poitrine de nos blousons ont été déplacées au niveau de la taille afin d’éviter toute gêne au porté, nous avons aussi changé le sens des fermetures et élargi le vêtement au niveau des hanches. » Enfin, les vêtements sont confectionnés à partir de tissu Bluestar dont le tissage permet aux vêtements de suivre les mouvements de la collaboratrice ou du collaborateur dans ses activités au quotidien. Les zones où l’usure est fréquente, telles que genoux ou bas de jambes, sont renforcées avec du Cordura.
L’idée d’adapter le vêtement de travail à la morphologie des femmes progresse aussi chez Cepovett. Disposant de 5 sites en France, ce groupe réalise 100 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 250 collaborateurs dont 48 au bureau d’études. Chaque année, il produit 10 millions de vêtements sur 8 usines intégrées et dispose de 30,000 m2 de capacité de stockage. Il habille notamment les agents techniques de la SNCF et les pilotes d’Air France. De belles références pour Cepovett qui vient de sortir un nouveau catalogue. Plus de 200 nouveautés y figurent avec de nouveaux modèles femme dans tous les secteurs d’activité. Dont 5 modèles de pantalons disponibles dans plus de 10 coloris différents. Comme en témoigne Prismik dédiée aux artisans du BTP. Cette gamme est fabriquée dans un coton/polyamide particulièrement résistant pour l’univers du BTP. « Elle s’adresse aux hommes comme aux femmes, avec des coupes de pantalons et de polos morphologiquement adaptés à chacun.», nous informe Marie Blanchard, directrice marketing et communication en charge du développement des produits sur catalogue.
Dans la notion de bien-être, intervient aussi le confort thermique. En prévision des journées hivernales, Chatard lance des sous-vêtements en Viloft, une fibre de viscose issue de la cellulose. Très douce et agréable au porter, elle est bactériostatique et hydrophobe.
« Elle possède les mêmes propriétés que le coton mais elle sèche plus vite », fait savoir Patrick Laffay, directeur général de Chatard qui est surtout connu pour ses vêtements haute visibilité et ses EPI. Cette PME, qui compte 23 personnes en France, réalise 60 % de son chiffre d’affaires avec la vente de produits fabriqués sur cahier des charges et le reste avec des articles sur catalogue.
Avec ces nouveaux sous-vêtements, Chatard vise les salariés qui travaillent en extérieur et sont habituellement engoncés dans des vêtements d’hiver inappropriés. Grâce à ces sous-vêtements thermiques l’employeur améliore le confort de travail de ses salariés pendant la période hivernale.
Eliane Kan
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