L’Assemblée nationale a adopté jeudi dernier en première lecture la loi Détox portée par le député écologiste Jean-Louis Roumégas. Appelé à être discuté au Sénat, ce texte instaure plusieurs mesures pour lutter contre la hausse des maladies chroniques due à la présence permanente des produits chimiques dans notre quotidien. Pour en limiter les effets, la loi institue un Plan national de substitution des substances chimiques préoccupantes (PNSSCP). Par arrêté conjoint, les ministres chargés de l’Environnement, de la Santé et du Travail vont publier chaque année une liste de substances dont les entreprises devront tenir compte. Sachant qu’elles devront chaque année faire un recensement qui devra être transmis à l’Institut national de l’environnement et des risques (Ineris). Le ministère de l’Environnement peut attribuer un label aux entreprises les plus vertueuses.
Autre disposition contenue dans la loi Detox, la mise en place par les agences de l’État d’une plate-forme d’aide technique, scientifique et financière à la substitution. Les députés ont également acté le principe d’une aide fiscale en cas d’actions menées dans le cadre du (PNSSCP). Enfin, les produits destinés au consommateur final pourront comporter dans leur étiquetage une mention précisant l’absence de toute substance de la liste du gouvernement.
Réglement Reach. Sans surprise, ce texte ne fait pas l’unanimité au sein des députés. Les écologistes, socialistes et radicaux ont voté pour. Le Front national s’est abstenu tandis que l’UDI et les Républicains ont voté contre une loi qui rajoute de « la réglementation à la réglementation en vigueur ». Selon les opposants à la loi Detox, cette loi présente des risques de nuire à la compétitivité européenne et fait doublon avec le règlement européen REACH. Des avis que partage l’Union des industrie chimiques (UIC) – qui précise que seules les entreprises de plus de 10 personnes sont concernées. Dans un communiqué paru mercredi dernier, avant l’adoption de la loi, son directeur général, Jean Pelin a jugé cette initiative « inutile et contre-productive ».
« Les démarches de substitution volontaire ou réglementaire sont depuis longtemps au cœur de la stratégie des entreprises », estime ce porte-parole. Pour l’UIC, cette loi va à l’encontre du choc de simplification réglementaire prévu dans le Pacte de responsabilité tout en rappelant que l’Union européenne s’est dotée de règlements ambitieux (REACH, CLP, cosmétiques, biocides, phytosanitaires…) et d’une organisation (ECHA, États Membres…) unique au monde pour protéger la santé publique et l’environnement. Cette initiative commence à porter ses fruits. « Ainsi, l’introduction d’une substance identifiée comme « extrêmement préoccupante » dans la liste candidate de REACH (168 substances inscrites à ce jour) donne un signal très fort aux entreprises en vue d’une substitution », fait valoir Jean Pelin.
Echéance 2018 « Parallèlement, en France, le code du travail impose de rechercher des solutions de substitution en présence de toute substance CMR (Cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction) et de conserver la traçabilité de ces démarches, rappelle le représentant de l’UIC. En rajoutant des contraintes administratives au seul niveau français, les entreprises vont devoir solliciter des moyens humains et financiers supplémentaires alors que leurs ressources sont particulièrement mobilisées pour réussir en 2018 la dernière échéance de REACH, la plus conséquente en termes de nombre de substances et d’entreprises visées. » Par conséquent, des impacts sur la compétitivité et l’emploi sont à craindre – notamment pour les PME – sans qu’aucun bénéficie n’ait été identifié. Enfin, l’UIC souligne que cette proposition de loi n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact ni sur le plan socio-économique, ni sur celui de la santé publique.
Eliane Kan
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