Avec une demande en croissance, le marché de la commande publique en systèmes de contrôle d’accès séduit les équipementiers et systémiers du secteur. Notamment pour sa transparence. Si les OIV et OSE réclament les niveaux de certification les plus sévères, les niveaux « sensible » et « peu sensible » laissent le champ libre à des systèmes innovants. Etat des lieux.
Selon Intercommunalités de France et la Banque des territoires, le marché de la commande publique pèse plus de 100 milliards d’euros en 2022. Surtout, il a progressé de 6,5 % d’une année sur l’autre. Une véritable manne financière qui offre un très grand avantage : la transparence de la demande ! En de dessous de 40 000 euros, il n’y a pas besoin d’appels d’offre publics. En revanche, les appels d’offres publics ou restreints s’appliquent aux marchés de 40 000 euros à 90 000 euros. Jusqu’à 215 000 euros, ils sont publiés dans le Bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP) ou dans un support d’annonces légales. Au-delà de cette somme, on peut aussi les trouver dans le Journal officiel de l’Union européenne (JOUE). Autre spécificité de la commande publique, l’obligation pour le fournisseur de s’inscrire sur Chorus Pro, la plateforme digitale de l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) qui gère la facturation électronique dématérialisée des marchés conclus entre l’État et ses sous-traitants. De quoi intéresser équipementiers et systémiers du contrôle d’accès comme, entre autres, Alcea, HID, Nedap, STid, SimonVoss, Synchronic, Suprema ou Til Technologies (Vitaprotech) qui, s’ils ne le sont pas déjà, auraient intérêt à se faire référencer auprès de l’Union des groupements d’achats publics (UGAP), la seule centrale d’achat public généraliste, placée sous la tutelle du ministre du Budget et du ministre de l’Education nationale.
Une commande publique plus ou moins importante selon les acteurs
« Une bonne cinquantaine de collectivités territoriales utilisent nos produits, explique Alexis Gollain, fondateur et PDG de Welcomr, une entreprise tourangelle créée en 2016 qui, avec 18 salariés, fabrique des unités de traitement local (UTL) de contrôle d’accès physique sécurisés pilotés par un logiciel disponible en Cloud. Nous fournissons ces collectivités soit au travers de partenaires intégrateurs soit en direct lorsque les collectivités nous contactent et que le marché est en dessus de 40 000 euros. » Même intérêt chez Synchronic : « La commande publique atteint chez nous 20 % », constate Jacques Rossignol, directeur commercial de Synchronic, membre du groupe Urmet Tertiaire qui comporte également Castel et MWS. Il est vrai que la synergie avec Castel, qui était bien implantée sur ce marché, nous a boostés depuis notre rachat par Urmet. » Cette proportion des ventes publiques dans le chiffre d’affaires peut aller encore plus loin : « Les marchés publics représentent probablement un volume supérieur à 50 % de nos ventes », lance Jean-Philippe Vuylsteke, président de Simons Voss France, fabricant d’origine allemande (racheté en 2015 par l’américain Allegion) de solutions de fermeture numérique et de contrôle d’accès qui réalise 12 millions d’euros de chiffre d’affaire en France (sur un total de 105 millions d’euros au niveau mondial en 2022) avec plus de 30 000 portes équipées.
Une demande en croissance
Reste que, la plupart du temps, équipementiers et systémiers du contrôle d’accès conçoivent et fabriquent des produits à vocation universelle pour le marché hexagonal et européen, voire international. Résultat, ils adoptent un modèle de vente indirect pour massifier les ventes. La conception des produits doit alors répondre au plus grand nombre d’applications. Et ce sont leurs distributeurs, intégrateurs ou installateurs qui sont en relation directe avec les acheteurs publics. Grâce aux remontées d’information provenant des revendeurs, certains acquièrent, néanmoins, une vision assez précise du niveau des achats publics dans leurs ventes. « Avec 10 % de croissance annuelle, la commande publique se révèle plus dynamique que le secteur de la distribution », développe le directeur commercial de Synchronic qui, avec 75 salariés, réalise 14 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022 – contre 11,5 millions en 2021. « Historiquement, nous travaillions déjà avec les villes. Puis le marché de la commande publique s’est développé en direction du secteur de l’éducation (écoles, lycées, universités, résidences étudiantes) et de la santé (principalement les hôpitaux) », retrace Jean-Philippe Vuylsteke.
Des demandes spécifiques
« Mairie, écoles maternelles et primaires, services techniques, locaux associatifs, installations sportives.. les municipalités doivent gérer un contrôle d’accès en multisite aussi avec des utilisateurs internes (agents municipaux, équipes techniques, personnels enseignants…) qu’externes (visiteurs, résidents, sous-traitants, responsables d’associations culturelles ou sportifs, fait valoir Jean-Philippe Vuylsteke. Comme les municipalités sont souvent en sous-effectif, leur demande en matière de contrôle d’accès portent de plus en plus sur des solutions qui leur permettent de gérer de manière intelligente et en temps réel le contrôle des accès à leurs bâtiments. » A savoir des solutions multisites, des serrures électroniques sans fil faciles à poser qui viennent se substituer aux serrures mécaniques à organigrammes de clés mécaniques. Le tout relié à une centrale de gestion des accès en temps réel soit sur serveur soit dans le Cloud avec badges physiques ou dématérialisés.
Du côté des écoles maternelles et primaires, les plans particuliers de mise en sûreté (PPMS), qui portent sur la mise en œuvre des mesures de sauvegarde des élèves et des personnels en cas d’attaque terroriste (en attendant l’arrivée des secours ou le retour à une situation normale), flèchent aussi la demande vers des systèmes de contrôle d’accès intelligents et en temps réel. « Avec la multiplication des catastrophes naturelles, des émeutes urbaines et des incivilités, la demande évolue des écoles vers d’autres types de bâtiments, précise le président de SimonVoss France. Face à une menace, les municipalités veulent avoir la capacité à bloquer en temps réel les accès. Inversement, en cas d’incendie, elles apprécient de pouvoir débloquer les accès pour que les secours puissent accéder le plus rapidement. »
La force relative des certifications
Qu’en est-il des certifications de sécurité ? « Pour le contrôle d’accès, le catalogue de l’UGAP définit trois niveaux de demande : très sensible, sensible, peu sensible », décrit Baptiste Dupart, directeur commercial France de STid, qui fabrique à Gréasques (13) des lecteurs de contrôle d’accès et les badges dématérialisés pour un chiffres d’affaires de 27 millions d’euros (+120 % sur 2021). « Le mode « très sensible » correspond, entre autres, aux organismes d’importance vitale (OIV) et aux opérateurs de services essentiels (OSE). Les systèmes de contrôle d’accès complets qu’ils commandent doivent avoir la Certification de sécurité de premier niveau délivrée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) », poursuit Baptiste Dupart. « Pour les grands acteurs de la commande publique en France, en particulier les acteurs sensibles, la certification devient un passage obligé », souligne Jacques Rossignol de Synchronic dont le système XSecur’ dispose du « visa de sécurité » CSPN mais surtout l’entreprise elle-même est qualifiée par l’ANSSI. Quant au contrôle d’accès du niveau « sensible » de la commande publique, son lecteur doit se conformer au standard Mifare DESfire EV3 et embarquer une puce EAL5+ qui sécurise le stockage des clés de sécurité. « Même s’ils ne sont pas certifiés par l’ANSSI, on peut aussi utiliser des systèmes de biométrie sur téléphone portable dès lors qu’ils répondent au cahier des charges », fait remarquer Baptiste Dupart. Pour sa part, le niveau « peu sensible » de la commande publique se contente de systèmes de sécurité élémentaires.
Erick Haehnsen
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