Avec une croissance de 4,2%, le marché de la sécurité se porte bien. Mais il doit faire face à une baisse attendue des budgets des directeurs de sécurité. La forte croissance qu'a connue la sécurité électronique risque de se tasser d'ici à 2026. Ce qui laisse de la marge. A noter : les débats sur le risque terroriste en entreprise et la sécurité globale gagnent en profondeur et en maturité.
L’édition 2017 d’APS, l’événement sûreté-sécurité le plus important en France qui s’est tenu du 26 au 28 septembre dernier au parc des expositions de la porte de Versailles à Paris, a été riche d’enseignements. Notamment au travers d’un impressionnant programme de 40 conférences et ateliers. Panorama
Croissance stabilisée
A commencer par la conférence « Marché de la sécurité : premiers chiffres 2016 et tendances 2017 », tenue par Patrick Haas, directeur du magazine En Toute Sécurité qui, dans la XVIIème édition de son Atlas parue en septembre, annonce des performances en trompe-l’œil pour la sécurité en 2016. Rappelons que cette analyse économique, unique en Europe, porte sur 1.600 entreprises du secteur (tous créneaux confondus). Côté rue, la croissance des ventes s’est stabilisée à 4,2% en 2016, soit près de quatre fois plus que la croissance de l’économie française (1,1%) pour un chiffre d’affaires global de 26,5 milliards d’euros et le nombre de sociétés rentable affiche un record. « Le gardiennage bénéficie largement du renforcement des mesures de sécurité avec une hausse de 5,1%, son meilleur score depuis une quinzaine d’années. Même performance élevée pour la cybersécurité (+8,7%), la vidéosurveillance (+7,4%) ou l’alarme anti-intrusion (+6,4%) », détaille Patrick Haas.
Baisse du budget des directeurs de sécurité
Côté cour, on s’attend à une baisse des budgets sécurité en 2017 et 2018. Après trois années de hausse en raison des vagues d’attentats terroristes, les directeurs prévoient une réduction de leur budget dès 2018, selon un sondage réalisé en mai et juin derniers. « Pour 42% des personnes interrogées, le budget sécurité 2018 sera en baisse tandis que 40% anticipent une hausse, 8% une stabilité et 10% ne savent pas encore, restitue Patrick Haas. Le changement est radical puisque nos précédents sondages faisaient ressortir une prévision de budget en hausse pour 54% des directeurs sécurité en 2017 et 77% en 2016. »
La vidéosurveillance en priorité
Quelles sont alors les chantiers prioritaires ? Le renforcement la vidéosurveillance (30% des réponses), une sécurité accrue des bâtiments (23%), la réalisation d’exercices de sensibilisation du personnel de l’entreprise à la sécurité, la centralisation des systèmes de sécurité électronique, la sensibilisation du personnel de l’entreprise à la sécurité… Une courte majorité des directeurs sécurité (54%) estime que la qualité des prestations des sociétés de sécurité s’est améliorée depuis deux ans. Ce qui se traduit par une meilleure prise en compte des risques plus élevés et une meilleure organisation du prestataire. « Dans ce monde très hétéroclite de la sécurité, le créneau de la sécurité électronique connaît une très forte progression. En 1996, il pesait 26% du chiffre d’affaires global, 53% en 2016 et il devrait atteindre, selon nos projections, 62% en 2026, reprend Patrick Haas. Vers 2025, cette progression devrait ralentir par rapport aux prestations incompressibles comme le gardiennage et la sécurité physique (blindage, serrurerie). De plus, les services vont intégrer de la High-Tech. Il n’y a plus de différence entre la croissance de la sécurité électronique et celle du gardiennage. »Entreprises : se protéger contre le risque terroriste
Une chose est sûre : les directeurs de ne subissent pas seulement une baisse attendue de leur budget de sécurité. « La décision d’investissement en sécurité ne vient plus du seul directeur sécurité mais de plus en plus du directeur financier ou du directeur des achats. Aux entreprises de sécurité privées d’être convaincantes, d’apporter non seulement du personnel bien formé mais aussi conseil », a indiqué Jean-Pierre Tripet, président du Syndicat national des entreprises de sécurité (Snes), qui, à l’occasion d’une conférence coorganisée avec la Délégation aux coopérations de sécurité sur le thème « Comment protéger son entreprise en cas de terrorisme ? », a précisé avoir édité un guide à ce sujet. La sécurité, c’est de l’investissement. La sécurité humaine, c’est de l’intelligence économique, le premier rideau qui va repérer les signaux faibles. »
Une sécurité allant des salariés jusqu’aux agents de sécurité armés
Et ce n’est pas le préfet Philip Alloncle, délégué aux coopérations de sécurité qui dira le contraire : « La sécurité en entreprise, c’est aussi important que la logistique ou la production. Avec les attentats [que l’on a connus ces dernières années en France], on en a pris conscience tardivement. Chaque salarié doit être un acteur de la sécurité. Il s’agit là d’une culture qui va se développer dans les entreprises. Ensuite, l’État doit créer un environnement propice au développement de la sécurité. »
Coopération et coordination de la sécurité globale
Et d’invoquer la création d’agents de sécurité privée armés. « C’est une petite mesure qui va dans le bon sens. Cette activité devrait voir le jour début 2018, une fois qu’on aura le décret, poursuit le préfet Philip Alloncle qui souhaite créer un continuum de coopération et de coordination entre Entreprises privées de sécurité, Gendarmerie nationale, Police nationale et Police municipale. La sécurité publique ne se cantonne pas seulement à l’État. Elle doit être globale. Dès lors que le secteur privé accepte de monter en puissance, il ne faut pas caler sur les premiers obstacles. » Et de prôner non seulement une formation garante de la qualité mais aussi l’échange de renseignements entre les diverses entités. « Nous travaillons avec les représentants des organismes professionnels à ce sujet. Au départ, cela se fera dans un cadre informel, explique le préfet. L’important, c’est de créer une connaissance en sécurité privée et sécurité publique. Il s’agit d’un projet qui sera présenté avant la fin de l’année. »
Erick Haehnsen
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