Le climat n’est toujours pas à la fête. Derrière les promesses de décarbonation de l’économie, les faits sont têtus. Après trois années de stagnation, les émissions de dioxyde de carbone (CO2) devraient repartir à la hausse en 2017. Tel est, du moins, le constat majeur des travaux publiés, ce lundi 13 novembre, dans la revue « Earth System Science Data », par le consortium scientifique Global Carbon Project (GCP) qui, chaque année depuis 2006, établit le bilan des émissions mondiales de CO2.
41 milliards de tonnes de CO2
En effet, la hausse devrait être de 2% cette année pour les émissions provenant des combustibles fossiles et des industries. Elles atteindraient autour de 41 milliards de tonnes de CO2. Toutefois, les puits de carbone (océans et forêts, principalement, qui captent le dioxyde de carbone) devraient un peu mieux fonctionner en 2017 qu’au cours des deux années précédentes où avait sévi le phénomène climatique El Nino. Il reste que les chercheurs tablent sur une nouvelle hausse de la concentration du CO2 dans l’atmosphère cette année. Elle devrait être, en ce moment, juste au-dessus de 405 ppm (parties par million). Elle atteignait 403,3 ppm en moyenne en 2016 selon les données de l’Organisation météorologique mondiale.
1/4 des émissions proviennent de Chine
C’est la Chine qui est surtout montrée du doigt. Tout d’abord, ses émissions de dioxyde de carbone augmentent cette année de 3,5 %. Ensuite, la république populaire est responsable de plus d’un quart des émissions mondiales CO2, à 28%. « C’est la reprise de la production industrielle en Chine cette année qui est la cause première de la remontée. De plus, l’année 2017 y a été moins pluvieuse, causant une réduction de l’hydroélectricité et rajoutant de la pression sur le charbon », explique au Figaro Corinne Le Quéré, professeur de la science des changements climatiques à l’Université East Anglia à Norwich (Grande-Bretagne) et coordinatrice du « Bilan mondial du carbone ».
Infléchissement de la baisse des émissions aux États-Unis
Une mauvaise nouvelle n’arrivant jamais seule, la baisse des émissions de CO2 aux États-Unis, sans discontinuité pendant cinq ans, marque une pause en 2017 à tout juste 0,4 %. Rappelons qu’elle s’établissait encore à 2,1 % en 2016. Cette tendance semble « reliée au prix du gaz qui a favorisé le charbon », ajoute Corinne Le Quéré. À cet égard, les chercheurs du GCP estiment que la demande de charbon devrait progresser de 0,5% cette année chez l’Oncle Sam. Quant à l’Inde, elle est sur la bonne voie. Au cours des dix dernières années, la hausse moyenne de ses émissions de CO2 s’établissait à 6% par. Cette année, elle affiche une hausse relative de 2%.
Doublement attendu des centrales à charbon
Notons que le charbon se porte bien. D’ailleurs, le chapitre français de l’association Les amis de la Terre s’apprête à publier mercredi prochain un rapport intitulé « Le charbon prend de l’assurance » (réalisé par Profundo) dans lequel il est affirmé que huit compagnies d’assurance (Axa, Groupama, Covea, AG2R La Mondiale), détenaient des actions et obligations d’un montant de 926 millions de dollars dans les 120 entreprises les plus actives en matière de construction de nouvelles centrales à charbon. Une capacité totale de 550 GW est ainsi prévue soit les deux tiers des 840 GW en cours de construction qui augmenteraient de 43 % les capacités actuelles.
Europe : peut mieux faire
Pour sa part, l’Europe accuse une stagnation de la baisse de ses émissions de CO2 à 0,2% en 2017 (0,3% en 2016). Dans le détail, les rejets ont augmenté de de 1,6% en France – probablement en raison de l’arrêt momentané d’une douzaine de réacteurs nucléaires, compensé par des centrales au gaz naturel et au fioul. De son côté, l’Allemagne continue à payer sa sortie progressive du nucléaire par une légère hausse de 0,9 % de ses émissions de CO2. Reste que ces piètres résultats français et allemands devraient peser mercredi prochain dans les discussions sur le climat lors de la COP23 à Bonn (Allemagne).
Erick Haehnsen
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