Interview du directeur Innovation & Développement du Centre national de protection et de prévention (CNPP) sur les systèmes de détection de fumées ou de flammes par analyse d’image et les systèmes de détection de chaleur par caméra thermique.
Comment la vidéodétection se positionne-t-elle par rapport à la lutte contre l’incendie ?
Tout d’abord, une installation de vidéodétection ne présente pas les mêmes objectifs que ceux de la vidéoprotection ou de la vidéosurveillance. En effet, ces deux dernières visent à surveiller les personnes, à les reconnaître. Voire à les identifier dans le cadre de la lutte contre la malveillance. Pour leur part, les solutions de vidéodétection servent à identifier un phénomène susceptible de conduire à un incendie.
Autrement dit, on utilise des caméras et non pas des capteurs conventionnels pour détecter un démarrage de feu…
Oui. Il existe principalement deux grandes familles de systèmes de détection incendie à base de caméra. Ces deux technologies s’appliquent à détecter différents phénomènes caractéristiques de l’incendie : les systèmes de détection de fumées ou de flammes par analyse d’image basés sur des caméras « classiques » ; et les systèmes de détection de chaleur par thermographie infrarouge, utilisant des caméras thermiques.
Commençons par les systèmes de détection de fumées ou de flammes par analyse d’image…
Ces systèmes utilisent donc les images fournies par des caméras de vidéosurveillance. Pour les systèmes actuels, c’est grâce à des algorithmes spécifiques qu’ils parviennent à identifier des phénomènes prédéterminés dans l’image. Ces algorithmes fonctionnent soit au sein de la caméra soit dans des serveurs dédiés.
Quelles sont les performances de ces algorithmes ?
Bonne, voire excellente, pour ce qui est de la détection. Et on peut penser que l’intelligence artificielle ne va faire qu’accroître cette efficacité. L’usage de cette technologie intéresse particulièrement les locaux de grande hauteur où la détection incendie classique atteint ses limites.
Et quelles sont les faiblesses de l’analyse d’image ?
Principalement la qualité des images analysées : capacité du capteur à s’adapter aux différences d’éclairage, positionnement de la caméra… Ces éléments jouent un rôle fondamental dans la performance du système. En effet, les phénomènes « reconnus » par les algorithmes ne se présentent pas de la même manière selon l’angle de vue de la caméra. De fait, il faut installer ces systèmes avec une logique de détection incendie.
Qu’en est-il des systèmes d’imagerie thermique ?
La détection de chaleur par thermographie infrarouge fonctionne dans le spectre des longues ondes de l’infrarouge (8 à 12 µm). Les détecteurs mesurent la luminance (puissance des rayonnements) qui provient des objets observés. Les images qu’ils créent, les thermogrammes, permettent d’identifier les niveaux de luminance d’une scène thermique observée. Le calculateur de la caméra thermique convertit cette luminance en température. Les systèmes à base de caméras thermiques détectent un point chaud dans le champ de vision de la caméra. Ils peuvent alors générer une alarme avec une grande précocité. Mais si la source de chaleur est cachée ou enfouie, alors la détection par thermographie infrarouge sera inopérante. Contrairement aux systèmes de détection de fumées ou de flammes, ces systèmes ne nécessitent aucun éclairage. Car ils mesurent les rayonnements émis par les objets du fait de leur chaleur.
Quelle est la maturité de ces systèmes ?
Très peu de systèmes de détection incendie par vidéo bénéficient de certifications. Pour l’heure, seuls le belge Araani et le français DEF ont obtenu un le label CNPP Certified. Et ce, pour des systèmes de détection de fumées et de flammes par analyse d’image. Seul le fabricant chinois HIKvision l’a obtenu pour des systèmes de détection de chaleur par caméras thermiques.
Quel est l’avenir des systèmes de détection incendie par vidéo ?
Ils se déploieront de façon encadrée sur les sites pour lesquels ils représenteront une solution de détection efficace : Entrepôts de grande hauteur, stockage à l’extérieur… Et cela pourra relever d’une prescription par la profession de l’assurance. Actuellement, le CNPP et certaines organisations professionnelles envisagent des pistes pour encadrer l’installation et la réception des installations de vidéodétection.
Propos recueillis par Erick Haehnsen
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