Interview du président Syndicat national des acteurs du marché de la prévention et de la protection depuis 2015, une des organisations professionnelles parmi les mieux structurées en Europe. Ce syndicat compte une centaine d’adhérents, du fabricant d’EPI jusqu'aux professionnels du conseil en prévention, en passant par les grossistes et les distributeurs.
Comment vos adhérents ont-ils vécu la crise du Covid-19 ?
La situation diffère selon le type d’acteurs. Durant le confinement, certaines PME ont enregistré des chutes de production industrielles de l’ordre de 60 % à 70 % pour les mois d’avril et mai. Mais elles pourraient bénéficier de phénomènes de rattrapage sachant que, pour juillet et août, les commandes commencent à arriver. La majorité des fabricants et distributeurs ont d’ailleurs connu une surcharge de travail liée à un afflux de demandes. Mais les donneurs d’ordre ne sont pas forcément allés au bout de leurs décisions.
Quels sont les acteurs qui ont su tirer partie de la crise ?
Les distributeurs et fabricants et distributeurs de masques, gants, sur-blouses et autres produits de protection ont profité de la crise. Mais ils ont aussi été confrontés à des problèmes d’approvisionnement dus à des tensions sur les matières premières et aux fermetures de frontières. Certains de nos industriels ont eu le courage de réorienter leur ligne de production afin de répondre à la demande liée au Covid-19. C’est le cas notamment de Protecthoms qui a développé une ligne de production afin de fabriquer des masques d’hygiène en tissu lavable.
Quels problèmes avez-vous rencontrés lors de cette période ?
C’était plutôt le Far-West. En cours de confinement, de grands donneurs d’ordre, américains notamment, ont préempté des ressources pour fabriquer des masques. Ce qui a créé une tension supplémentaire à la production de ces articles. Par ailleurs, il y a eu des effets d’aubaine en Chine. Des entreprises s’y sont créées pour produire des masques chirurgicaux. Certaines en ont d’ailleurs profité pour commettre des abus et des usurpations d’identité en vendant des produits frauduleusement certifiés ne répondant pas à la conformité de la norme CE.
Quels enseignements faudrait-il retenir de cette crise ?
En France, à la différence des grands distributeurs qui ont su fiabiliser leur sourcing et leur chaîne logistique, le manque de coordination des réseaux d’achats hospitaliers dans les intentions d’achat de masques chirurgicaux a entraîné des difficultés d’approvisionnement. Par conséquent, des adhérents se sont vus contraints de geler leurs stocks. Du coup, ces entreprises risquent de se retrouver avec des stocks sur-approvisionnés et susceptibles de se périmer. Il faudrait que les pouvoirs publics européens et nationaux en tirent les leçons en ayant une vision coordonnée et globale des moyens à court, moyen et long termes.
À cet égard, que pensez vous des masques en tissu certifiés par Afnor ?
Leur arrivée a créé de la confusion. Les dirigeants d’entreprises utilisatrices se retrouvent dans un flou artistique et se demandent si les masques chirurgicaux ne sont pas un luxe par rapport aux masques en tissu.
Êtes-vous inquiet de la crise économique à venir ?
Je n’ai pas eu d’écho alarmistes des adhérents qui se sont plutôt bien adaptés. Il ne me semble pas qu’il y ait des entreprises véritablement en danger, sous réserve que l’activité reprenne. En outre, notre secteur est assez particulier. On a vu que, lors de la crise de 2008, nos entreprises ont connu une moindre décroissance que dans les autres secteurs de l’économie. Certains de nos adhérents ont même eu tendance à sur-performer car lors des fermetures d’usine, il y a eu un besoin accru d’EPI afin d’éviter les accidents du travail. En revanche, en période de post-crise, on a eu tendance à sous-performer. Pour l’heure, nos adhérents se sont plutôt bien adaptés à la situation. Certains nous ont fait part de leurs intentions d’exposer sur le salon Expoprotection afin d’avoir de la visibilité sur le marché.
Retrouvez certains adhérents du Synamap au Salon Expoprotection, qui aura lieu du 3 au 5 novembre 2020 à Porte de Versailles.
Propos recueillis par Eliane Kan
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