Après une carrière de photographe de presse indépendant puis responsable du département Corporate au sein de l’agence de presse photographique Rapho pendant 12 ans, Philippe Kohn suit une formation aux Arts et métiers, à la chaire de pédagogie des adultes. Ce qui le conduit à monter une activité où il anime depuis plusieurs années des formations et ateliers sur des sujets liés à l’image pour les entreprises. « C’est dans ce contexte que j’ai innové en créant des romans photo au service de la prévention des risques au travail », explique-t-il.
Collaborateurs, HSE et hiérarchie assis à la même table
Pourquoi le roman photo ? « Je cherchais à renforcer l’efficacité de la communication en prévention en impliquant les salariés concernés. Et le roman photo m’est apparu comme un outil de co-construction particulièrement efficace, développe le fondateur d’Images en action. En effet, il s’agit d’une démarche participative dans laquelle les collaborateurs, le responsable HSE (Hygiène, Santé, environnement) et la hiérarchie s’assoient à la même table pour résoudre une problématique précise de sécurité et santé au travail (SST). »
Phénomène de projection-identification
Cette démarche crée du lien social au sein de l’équipe qui va produire une œuvre collective liée. Un groupe de volontaires co-réalise le roman photo. C’est aussi l’occasion de multiplier les échanges, de discuter de la problématique de SST, d’avancer sur des solutions collectives et de définir des plans d’action concrets. « Par ailleurs, l’engagement des volontaires s’en trouve valorisé car le roman photo est diffusé dans l’entreprise, reprend Philippe Kohn. Au final, les collaborateurs volontaires sont scénaristes et acteurs du roman photo. Ce qui renforce l’efficacité des messages grâce au phénomène de projection-identification des lecteurs de l’œuvre aux personnages interprétés par leurs collègues. » En clair, Images en action ne recourt pas à des comédiens professionnels, mais bien aux collègues en chair et en os. « Il y a donc un empathie naturelle de la part des lecteurs. Du coup, le message passe mieux car la démarche de prévention est incarnée par des personnages que chacun connaît pour de vrai », poursuit l’ancien photographe de presse.
En collaboration avec le responsable HSE
La démarche s’articule autour de trois étapes. « Durant l’atelier, nous commençons par construire l’histoire à raconter en roman photo à partir de la problématique SST déterminée en amont par le responsable HSE. Nous nous réunissons autour d’une table avec quatre à six salariés volontaires et le responsable HSE. L’histoire est tirée du vécu, de l’expérience réelle des collaborateurs. Notamment en ce qui concerne l’accidentologie », détaille Philippe Kohn. Dans un second temps, émergent le scénario, le découpage de l’histoire en images, les dialogues, les actions et les attitudes. Enfin, viennent les prises de vue photographiques. Chaque participant interprète un personnage dans le cadre de sa propre fonction. Il ne reste alors plus qu’à traiter les images les plus pertinentes et à mettre en page le roman photo. En général, il s’agit d’un document quatre pages en A4 imprimé et diffusé auprès des collaborateurs concernés par le sujet. Mais il peut aussi s’agir d’une animation digitale afin de multiplier les canaux de diffusion. Quant au prix d’une intervention, il varie de 3 000 à 4 000 euros, selon les options.
Des opérations concrètes
Bien que cette activité n’en soit qu’à ses débuts chez Images en action, la société a mis sa méthode en œuvre chez SMR Automotive, un industriel qui assemble des rétroviseurs pour les constructeurs automobiles européens. Situé près de Melun (77), le site emploie 600 personnes. Le roman photo a porté sur les collisions dues à la co-activité entre piétons et engins roulants sur une ligne de production. « Six mois plus tard, nous avons dressé un bilan de cette opération : le nombre de collisions est tombé à zéro », souligne Philippe Kohn. Chez Attila Système (voir photo), premier réseau français de maintenance de toitures industrielles, un premier roman a été élaboré pour accompagner la mise en place d’une procédure d’alerte en cas de presque-accident. Lorsque celui-ci se produit, un collaborateur envoie un SMS à l’agence pour le signaler et mettre en oeuvre une action corrective ou préventive, selon le cas. Un second roman photo a vu le jour, cette fois-ci concernant la vitesse au volant. Pour le transporteur de passagers Cars d’Orsay (Transdev), il s’agissait d’illustrer les dangers liés à l’utilisation du téléphone portable au volant. Un fléau dans l’air du temps…
Erick Haehnsen
Commentez