Info.expoprotection – En quoi consiste l’activité du groupe Solvay ?
Jacques de Gerlache – « Depuis notre fusion avec Rhodia, le groupe pèse 12,7 milliards d’euros et rassemble 29 000 salariés répartis sur 110 sites industriels importants dont 16 en France. Nous produisons de la chimie et des polymères de base et de spécialité. Notre portefeuille contient plusieurs milliers de produits depuis le bicarbonate de soude jusqu’aux plastiques de haute performance en passant par le PVC, le polyamide et les polymères fluorés. »
Info.expoprotection – Comment s’organise votre politique de prévention des risques ?
Jacques de Gerlache – « En matière de santé au travail nous avons cinq niveaux d’organisation. Le premier niveau concerne le design et la qualité des installations qui sont conçues pour fonctionner au moins cinquante ans et adaptées en permanence aux meilleures pratiques. Il faut donc veiller à ce qu’il n’y ait pas de problème d’ordre technologique ou technique. D’ailleurs, la majorité des accidents n’est pas liée à nos processus mais à des chutes de hauteur ou se sont produits lors d’un trajet motorisé. Notre deuxième niveau d’organisation se focalise sur la maîtrise et le contrôle des ambiances de travail. Cela concerne notamment l’exposition aux substances chimiques, la ventilation, le bruit et la chaleur. Nous nous assurons que l’ambiance de travail de chacun de nos sites est au minimum conforme à la législation locale. »
Info.expoprotection – En tant qu’entreprise internationale, avez-vous des standards internes ?
Jacques de Gerlache – « Effectivement. Notre politique de sécurité a pour principe de respecter les valeurs limites d’exposition (VLE), qui intègrent en général des marges de sécurité qui peuvent aller de 100 voire à 1 000. Celles-ci doivent néanmoins garder un certain réalisme pour pouvoir être applicables. Nous adhérons au minimum aux normes sévères établies par l’organisation American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH), qui établit des valeurs limites d’exposition pour un millier de substances. Lorsqu’une VLE réglementaire est moins sévère, ce qui est possible dans certains pays, nous imposons au site concerné d’adopter celles de l’ACGIH. Par ailleurs, lorsqu’une VLE n’existe pas pour une substance (c’est le cas pour certaines de nos substances), un groupe d’experts est chargé en interne d’établir une valeur Solvay Acceptable Exposure Limit (SAEL) à ne pas dépasser. »
Info.expoprotection – Comment contrôlez-vous les ambiances de travail ?
Jacques de Gerlache – « Nous effectuons régulièrement des contrôles à l’aide de détecteurs. Ils sont plus ou moins fréquents selon la dangerosité des produits. A titre d’exemple, l’usine de Tavaux, dans le Jura, qui produit du chlorure de vinyle pour fabriquer du PVC est sous la surveillance permanente de chromatographes qui mesurent la concentration dans l’air. En cas d’alerte, des mesures sont prises pour évacuer le personnel. Certaines substances, comme le mercure, font l’objet d’analyses de biomonitoring, qui mesurent la concentration présente au sein de l’organisme. »
Info.expoprotection – Vos salariés portent-ils des équipements de protection individuelle ?
Jacques de Gerlache – « Oui, notamment dans les cas où la sécurité de l’ambiance de travail n’est pas assurée en permanence, par exemple, lorsque les salariés doivent faire une intervention particulière ou certaines activités particulières. C’est notamment le cas sur le site de la Rochelle où sont manipulées des terres rares. Les salariés sont tenus de porter des gants, des lunettes de sécurité. Sans oublier le casque et les chaussures de sécurité dont le port est obligatoire sur tous nos sites industriels. Nous avons d’ailleurs développé un outil d’analyse du poste de travail, le EA tool, une sorte de check liste qui permet d’observer chacun des postes, de faire l’inventaire des risques, de recenser les substances utilisées, etc. de sorte à définir les EPI à porter, la formation à suivre et le mode opératoire. »
Info.expoprotection – Vos salariés suivent-ils une formation aux procédures de sécurité ?
Jacques de Gerlache – « Bien sûr, il s’agit d’ailleurs du quatrième niveau de notre politique de sécurité. Nos salariés sont formés aux procédures et prescriptions réglementaires sachant que la cause essentielle des accidents relève des erreurs humaines, d’un comportement ou d’un suivi des procédures déficients. Nous avons le même niveau d’exigence de formation au niveau des sous-traitants qui doivent passer un QCM avant de pouvoir travailler sur nos sites. »
Info.expoprotection – Qu’en est-il du suivi médical des salariés ?
Jacques de Gerlache – « Il s’agit justement du cinquième niveau de notre politique de prévention et de protection de la santé au travail. Nous réalisons un suivi médical individualisé. Un outil informatique original baptisé Medexis (Medical exposure information system) et développé par Solvay est progressivement mis au service des hygiénistes et des médecins du travail. Il collecte et conserve les données de type “expositions” et de type “médecine du travail”. Le déploiement, en cours, commence pour chaque site par le volet « hygiène », et le suivi s’effectue par le volet “médical”. Il s’agit d’un système très sécurisé afin de garantir la confidentialité des données de santé et de la vie privée de nos salariés. »
Propos recueillis par Eliane Kan/Agence TCA
Interview de Jacques de Gerlache, toxicologue, responsable communication santé, sécurité, environnement et de la gestion de crise chez Solvay.
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