Les entreprises privées de sécurité sont à l'aube d'une révolution qui va les aider à développer de nouvelles prestations, intégrant des technologies avancées telles que la robotique mobile, l'intelligence artificielle, la biométrie, etc. De quoi susciter l'intérêt de leurs clients dont certains ont d'ores et déjà pris le train de l'innovation en marche.
Intelligence artificielle, Big Data, objets connectés (IoT), robotique mobile… ces nouveaux outils sont appelés à améliorer la sécurité des biens et des personnes. « Mais l’intégration de ces technologies s’apparente à une révolution digitale aussi puissante que celle que nous avons rencontrée dans les années 2000 avec l’arrivée de l’internet protocole (IP), de la vidéosurveillance et des plateformes de service », estime Servan Lépine, président d’Excelium – exposant sur le salon Expoprotection, dans le cadre du Programme Expert Sécurité privée & Technologie. Servan Lépine est également animateur du collège métiers, hommes et technologies au Syndicat national des entreprises de sécurité (Snes).
Des freins à lever
Pour intégrer ces technologies dans leurs prestation, les entreprises privées de sécurité doivent lever différents freins. Entre autres, la nécessité de former les équipes ou d’investir dans des équipements complexes, coûteux et dont on ne maîtrise pas forcément l’obsolescence. Sans oublier la complexité de la réglementation, notamment en matière de biométrie. « La technologie est mature mais le cadre réglementaire en limite le déploiement », souligne Servan Lépine. Beaucoup d’entreprises de sécurité s’intéressent à ces technologies digitales mais rares sont celles qui ont sauté le pas. A l’exception de Securitas qui vient d’acquérir Automatic Alarm, un intégrateur-installateur de solutions de sécurité électronique (anti-intrusion, vidéosurveillance, contrôle d’accès…).
Robot rondier de télésurveillance
France Intervention a également racheté la startup Robotech, qui fournissait un robot rondier de télésurveillance développé en partenariat avec Effidence. « Nous souhaitons proposer prochainement un service global qui associera le robot et nos agents de sécurité », explique Teddy Métayer, directeur technico-commercial de France Intervention. Ce groupe compte 125 salariés réparties sur toute la France, notamment en Normandie, Picardie, Nord, Champagne Ardennes et Île-de-France. Ils interviennent dans des zones désertiques ou difficiles d’accès. La commercialisation des robots rondiers dans les offres de France Intervention est prévue pour l’an prochain. Ils seront capables de patrouiller tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des bâtiments. « De quoi renforcer la sécurité des lieux et des personnes sachant que le robot sera l’œil déporté de l’agent de sécurité. »
Des réflexions en cours sur la sécurité et sûreté de demain
Ces deux exemples susciteront sûrement l’intérêt du Club des directeurs de sécurité et de sûreté des entreprises (CDSE) qui a pris le train de l’innovation en marche. En témoigne la première édition de l’Odyssée organisée par le CDSE Lab. Cette communauté professionnelle regroupe une quarantaine de jeunes professionnels des directions de sécurité et sûreté d’entreprises membres du CDSE ainsi que des startups afin de réfléchir aux métiers de la sécurité et la sûreté de demain. En partenariat avec Thales, le Lab a donc organisé jeudi dernier une journée thématique sur le thème de l’intelligence artificielle à la rencontre de la sûreté. Objectif ? Accélérer les synergies entre les différents acteurs privés et publics de l’innovation. « Devant plus de 300 participants, une quinzaine de startups y ont présenté leurs innovations en matière de sûreté et de sécurité », explique Julien Marcel, secrétaire général du CDSE et président du CDSE Lab. Certaines font l’objet d’expérimentations qui servent à évaluer comment elles devront être adaptées aux besoins des utilisateurs et dans quel cadre réglementaire.
Une nouvelle vision de la sécurité et de la sûreté
Toutes ces innovations ont un point commun : elles se fondent sur l’intelligence artificielle. De quoi nourrir une nouvelle vision de la sécurité et de la sûreté. « L’intelligence artificielle va révolutionner les métiers et les organisations », s’enthousiasme Stéphane Volant, le président du CDSE. « Il ne s’agit pas de remplacer les femmes et les hommes de la sécurité et de la sûreté par des machines mais de renforcer leur capacité d’anticipation et de réaction pour faire mieux, aller plus vite et plus loin », fait valoir le président du CDSE en donnant des cas concrets. Par exemple, l’IA permettra d’identifier dans un magasin un client au comportement suspect grâce à l’analyse de signaux faibles tels que la montée de sa température corporelle, un comportement hésitant… L’IA pourra également être couplée à de la reconnaissance faciale. Par exemple, si l’on détecte qu’un bagage a été oublié, on sera en mesure d’en rechercher le propriétaire dans les images de vidéosurveillance et de la rechercher dans la foule en se basant uniquement sur sa silhouette (taille, couleur de ses cheveux et de ses habits par exemple) et sans qu’il soit nécessaire de consulter des fichiers à caractère personnel, conformément au Règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD). « L’encadrement strict de ces nouvelles pratiques par la Commission nationale Informatique et Libertés (Cnil) va d’ailleurs garantir une application éthique de ces nouvelles technologies et supprimer le risque d’un phénomène Big Brother », estime Stéphane Volant, qui nous donne rendez-vous à la deuxième édition de l’Odyssée, en 2019.
Eliane Kan
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