A l’occasion du salon Expoprotection 2018, Patrick Haas, directeur d’En toute sécurité (qui fête son trentième anniversaire cette année), nous livre les résultats de la 20e édition annuelle de son Atlas de la sécurité, qui dissèque les bilans de pas moins de 1 700 sociétés positionnées sur le marché français de la sécurité. Une étude unique en son genre sur le territoire européen.
Un marché de 28,8 milliards d’euros en croissance de 2,9%
Tout d’abord, le marché de la sécurité est un poids lourd de l’économie française avec un chiffre d’affaires cumulé de 28,2 milliards d’euros en 2017 – en croissance de 2,9% par rapport à 2016. Dont 4,5 milliards pour le créneau de l’alarme-contrôle d’accès-vidéosurveillance et 3,9 milliards pour la sécurité intérieure de l’État, à égalité avec le gardiennage. Pour sa part, la cybersécurité s’arroge 3,5 milliards, suivie par les matériels de sécurité incendie (3,2 milliards) et les équipements de protection individuelle (EPI) à 2,5 milliards. Très loin derrière, les recettes de la télésurveillance atteignent les 800 millions d’euros, devant la serrurerie (650 millions) et les drones (à peine 60 millions).
Premier enseignement de l’Atlas d’En toute sécurité, l’impact économique des attentats est terminé. « 2015 et 2016 ont été deux années fastes pour le secteur. Le ralentissement s’est fait sentir dès le deuxième semestre de 2017 dans le gardiennage, et début 2018 pour la sécurité électronique. Par ailleurs, on constate une reprise de la guerre des prix », explique Patrick Haas. De fait, l’Atlas d’En toute sécurité anticipe un effritement de la croissance du secteur avec une estimation à 2,1% pour 2018 et 1,8% pour 2019. A cet égard, un sondage d’En toute sécurité auprès des directeurs de la sécurité révèle que 77% de ces décideurs prévoyaient une hausse de leur budget en 2017, contre 60% pour 2018 et 41% pour 2019. « Après la vague massive des investissements en sécurité suite aux attentats, les directeurs de la sécurité estiment à présent qu’ils sont à jour des menaces », analyse Patrick Haas.
La part de la sécurité électronique va croissant
Dans ce contexte, « la croissance de la sécurité reste deux à trois fois plus rapide que celle du PIB sur une période allant de 2012 à 2018. Quant à la croissance de la sécurité électronique, elle est deux fois plus rapide que celle du secteur global de la sécurité », reprend Patrick Haas. Dans le détail, les secteurs de la sécurité électronique les plus dynamiques sont la vidéosurveillance, avec une progression de 7,4% en 2016, 6,1% en 2017 et une prévision à 5,7% pour 2018. Puis l’alarme-intrusion (6,4%, 6% et 5,2% respectivement) et le contrôle d’accès (5,1% ; 5,4% ; 4,8%). Quant à la croissance de la cybersécurité, elle reste très vigoureuse, à 8,7% en 2016, 15,1% pour 2017 et avec une prévision de 13,8% pour cette année. En parallèle, la croissance du créneau du gardiennage a marqué un coup d’arrêt brutal tombant de 5,1% en 2016 à 1,1% en 2017, avec une estimation de croissance d’à peine 0,4% sur l’année 2018. Par ailleurs, « nous assistons à une redistribution des cartes entre les acteurs avec de nouvelles acquisitions », remarque le directeur d’En toute sécurité. En effet, DEF a acquis Detectomat et Multi Alarm ; Anavéo, VAE et RM Sécurité ; Sogretel, Eryma et Iseo, Locken. Chez les poids lourds Idemia a racheté Morpho et Oberthur ; Sécuritas France, Automatic Alarm et le fonds d’investissement OpenGate Capital, Gunnebo France.
Sécurité électronique : une croissance durable malgré les incertitudes
Autre enseignement de l’Atlas d’En toute sécurité : la croissance de la sécurité électronique est durable. De fait, sa part du marché total de la sécurité n’a cessé de croître : de 26% en 1997, elle est passée à 43% en 2007, puis 54% en 2017. Cette croissance devrait atteindre son pic, à 62 % en 2027. Mais tout n’est pas si rose ! « Il existe des incertitudes liées aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) qui investissement massivement dans la sécurité, faisant perdre des parts de marché aux acteurs traditionnels du secteur, souligne Patrick Haas. La majorité des acteurs de la sécurité électronique ont une taille de 1 à 2 millions d’euros de chiffre d’affaires. Face à la puissance des GAFAM, ce marché est donc trop morcelé. Beaucoup d’acteurs devraient disparaître… » A moins que les acteurs ne décident de se concentrer. Ceci dit, les GAFAM se positionnent davantage sur les produits grand public, notamment en relation avec le marché de masse de la domotique. Ce qui laisse, pour l’instant, de la place aux acteurs des niches professionnelles positionnés sur la sécurité sur mesure. Enfin, le prochain facteur d’accélération du marché de la sécurité devrait se mettre en place dans le cadre des Jeux Olympiques de 2024, événement pour lequel 30 000 agents de sécurité privée seront recrutés. A cette date, les nouveaux systèmes de sécurité électronique, à base d’intelligence artificielle et de robotique, devront être éprouvés et installés. La compétition ne fait que commencer !
Erick Haehnsen
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