De 1994 à 2003, dans le secteur privé, l’intensité du travail a augmenté tout comme les marges de manœuvre, tandis que les expositions aux contraintes physiques dans le travail ont reculé. Entre 2003 et 2010, en revanche, les rythmes de travail et les contraintes physiques se stabilisent alors que l’autonomie des salariés les plus qualifiés recule. C’est ce que révèle les derniers résultats de l’enquête Sumer publiée par la Dares.
Sur cette dernière période, les salariés se plaignent moins souvent de manquer de moyens pour faire correctement leur travail, mais ils signalent plus fréquemment subir des comportements hostiles, ou ressentis comme tels, dans le cadre du travail.
L’exposition aux produits chimiques diminue globalement entre 2003 et 2010. Les salariés sont plus souvent exposés à des agents biologiques dans un contexte marqué, notamment, par la pandémie grippale en 2009.
Agents chimiques : une baisse des expositions depuis 2003
En 2010, un tiers des salariés du secteur privé ont été exposés à au moins un produit chimique lors de la dernière semaine travaillée précédant l’enquête. Cette proportion a diminué de plus de trois points entre 2003 et 2010, revenant globalement au niveau de 1994.
Cependant, pour les professions les plus exposées (employés de commerce et de service, ouvriers), l’exposition à un produit chimique reste plus élevée en 2010 qu’en 1994. L’exposition mesurée ici est définie dans une acception large, puisqu’elle englobe toutes les durées d’exposition et tous les types de produits chimiques dont les effets pathogènes peuvent être de nature, de gravité et de délai d’apparition très différents (action immédiate de type brûlure ou irritation, réactions allergiques, effets différés comme les cancérogènes, etc.).
La décrue des expositions aux produits chimiques sur la période récente s’inscrit dans un contexte de renforcement de la réglementation (décret « CMR » du 1er février 2001, décret « agents chimiques » du 23 décembre 2003), des incitations (plan Santé-Travail 2005-2009) et de la jurisprudence (arrêt « amiante » de la Cour de cassation du 28 février 2002), qui a pu améliorer la prise de conscience des risques et inciter à développer la prévention.
– L’évolution est différente selon les types de produits.
• L’utilisation des tensioactifs (principes actifs des détergents, des savons et des shampoings) s’accroît légèrement, passant de 6 % de salariés exposés en 1994 à 8 % en 2010.
• L’exposition aux solvants passe de 12 % à 14 % entre 1994 et 2003 avant de revenir à 13 % en 2010.
En 2010, 14 % des salariés du secteur privé ont été exposés à au moins trois produits chimiques lors de la dernière semaine travaillée précédant l’enquête, soit deux points de moins qu’en 2003 (16 %) mais un peu plus qu’en 1994.
Les ouvriers sont les plus concernés par cette multi-exposition : 32 % des ouvriers qualifiés et 23 % des ouvriers non qualifiés ont été exposés à au moins trois produits chimiques, un pourcentage en légère hausse par rapport à 2003 pour les ouvriers qualifiés. A contrario, les cadres et professions intermédiaires ont moins connu de multi-exposition.
Forte progression des expositions aux agents biologiques, dans un contexte de pandémie grippale en 2009
En 2010, 18 % des salariés du secteur privé déclarent avoir été exposés à des agents biologiques lors de la dernière semaine travaillée précédant l’enquête, contre 12 % en 2003 et 10 % en 1994. Cette progression concerne particulièrement les employés de commerce et de service, dont le taux d’exposition passe de 20 % en 1994 à 26 % en 2003 et 42 % en 2010. La progression est assez forte aussi dans le cas des ouvriers qualifiés et non qualifiés (6 % en 1994, 9 % en 2003 et 14 % en 2010 pour les premiers ; 14 % en 1994, 16 % en 2003 et 21 % en 2010, pour les seconds).
Ce sont surtout les expositions à des agents biologiques émanant d’autres personnes (« réservoir humain ») qui progressent. Elles concernent 5 % des salariés en 1994, 6 % en 2003 et 10 % en 2010. Cette hausse concerne en particulier les possibilités de contamination respiratoire : 3 % des salariés étaient concernés en 2003, 7 % en 2010, avec une hausse particulièrement forte pour les employés de commerce et de service (de 9 % à 19 %).
Ces évolutions s’expliquent sans doute, pour une large part, par une plus grande sensibilité des salariés et des médecins du travail aux risques de pandémie grippale, notamment pour les professions les plus exposées au contact avec le public.
Source : Dares, Analyses, mars 2012, n° 23
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